La rupture conventionnelle est une procédure permettant à un salarié et un employeur de se séparer d'un commun accord. Toutefois, elle aboutit parfois à des abus.
Bon à savoir : depuis le 1er janvier 2020, et à titre expérimental jusqu'au 31 décembre 2025, la rupture conventionnelle est possible pour les fonctionnaires et les agents publics contractuels. Un fonctionnaire et l’administration qui l’emploie peuvent donc conclure une convention de rupture du contrat de travail dans les mêmes conditions que celles existant dans le secteur privé (loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020 et décret n° 2019-1593 du 31 décembre 2019). Un arrêté du 6 février 2020 fixe cinq modèles de convention de rupture conventionnelle applicables aux fonctionnaires et aux agents contractuels des trois versants de la fonction publique, aux ouvriers des établissements industriels de l’État et aux praticiens hospitaliers.
Rupture conventionnelle et licenciement déguisé
Certains employeurs imposent parfois aux salariés la rupture conventionnelle, pour éviter d'avoir à effectuer une procédure de licenciement.
Pour l'employeur, cette pratique revêt deux avantages majeurs :
- Le premier, c'est d'avoir à effectuer une procédure beaucoup moins lourde qu'une procédure de licenciement.
- Le second, c'est de pouvoir refuser certains droits aux salariés. Par exemple, le salarié ne pourra bénéficier de mesures normalement dues dans le cadre d'un licenciement économique :
- la solution de reclassement ;
- ou la priorité de réembauche.
Bon à savoir : la nullité d’une rupture conventionnelle peut être prononcée pour vice de consentement dès lors que l’employeur a caché au salarié l’existence, à la date de conclusion de la convention de rupture, d’un plan de sauvegarde de l’emploi qui prévoyait la suppression de son poste et que cette dissimulation a été déterminante du consentement du salarié (Cass. soc., 6 janvier 2021, n° 19-18.549).
La rupture conventionnelle peut valablement être conclue pendant le congé de maternité d’une salariée et dans les quatre semaines suivant la fin de son congé (Cass. soc., 25 mars 2015, n° 14-10.149), ou au cours d’une période de suspension du contrat de travail résultant d’un accident du travail (Cass. soc., 30 sept 2014, n° 13-16.297).
Par ailleurs, une rupture conventionnelle peut être valablement conclue entre un employeur et un salarié déclaré inapte à son poste à la suite d’un accident du travail (Cass. soc., 9 mai 2019, n° 17-28.767). Cette solution permet à l'employeur d'éviter un licenciement pour inaptitude et donc de s'exonérer d’une recherche de reclassement et du paiement de l'indemnité spécifique de licenciement et de l'indemnité compensatrice, sauf cas de fraude ou de vice du consentement.
À noter : parfois les entreprises offrent une indemnité de départ importante au salarié pour qu'il accepte une rupture conventionnelle plutôt qu'un licenciement.
Bon à savoir : un employeur peut décider d'antidater une rupture conventionnelle dans le but d'éviter d'attendre les 15 jours de rétractation et d'accélérer ainsi le départ du salarié. Mais cette pratique est risquée. En effet, en cas d'action en justice du salarié, la rupture conventionnelle sera annulée et requalifiée en licenciement injustifié (CA Montpellier, 8 janvier 2020, n° 16/02955).
Le salarié qui se voit imposer une rupture conventionnelle contre sa volonté :
- peut se rapprocher d'un avocat, d'un syndicat ou du conseil des prud'hommes de sa juridiction pour contester la rupture ;
- il pourra ainsi faire valoir ses droits puisque, on le rappelle, le principe est celui du commun accord.
À noter : le salarié a 12 mois pour dénoncer un licenciement déguisé en rupture conventionnelle. Il peut la contester dans ce délai même s’il a accepté la rupture dans un premier temps.
Bon à savoir : si le salarié se trouve dans une situation de violence morale en raison du harcèlement moral qu'il subit au moment de la rupture du contrat de travail, la rupture conventionnelle signée par lui et par l'employeur est considérée comme nulle au motif que le consentement du salarié était vicié (Cass. soc., 29 janvier 2020, n° 18-24.296).
Par ailleurs, en cas de refus d’homologation par la DREETS (direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités), l’employeur ne peut pas modifier la convention de rupture et la renvoyer à la DREETS sans la faire signer une nouvelle fois par le salarié. En effet, la liberté de consentement est une condition de validité de la rupture. Par conséquent, la nullité de celle-ci est encourue si l’employeur renvoie une demande d’homologation modifiée sans avoir fait signer de nouveau le salarié (Cass. soc., 24 juin 2020, n° 18-17.262).
Rupture conventionnelle : attention aux abus Lire l'article
Assumer sa démission
Pour l'employé, demander une rupture conventionnelle plutôt que démissionner offre un avantage certain : il pourra prétendre à une allocation chômage, ce qui n'est pas le cas dans le cadre d'une démission. Cette « pirouette » juridique constitue un abus du système. Un salarié qui souhaite démissionner doit passer par la procédure appropriée.
L'employeur peut d'ailleurs refuser la rupture conventionnelle :
- soit parce qu'il ne veut pas se séparer d'un salarié compétent et agréable ;
- soit parce que la rupture conventionnelle l'obligera à payer une indemnité de départ qui n'est pas due dans le cadre de la démission.
Bon à savoir : en cas de conflit (sur la rémunération, sur une éventuelle mutation, etc.) entre l’employé et l’employeur, la rupture conventionnelle n’est pas possible.