Système de pointage

Sommaire

Cours dans l'entreprise

Un système de pointage doit répondre aux impératifs résultant de la législation, de l'organisation en vigueur dans l'entreprise et du management de l'employeur.

La loi impose à l'employeur d'organiser le pointage du personnel. L'employeur doit donc choisir une méthode de pointage et le matériel adapté.

Avant de faire un bon choix, voici les trois questions à se poser :

  • Quelles sont les caractéristiques légales d'un système de pointage ?
  • Le type d'entreprise et son organisation impactent-ils le mode pointage ?
  • Le mode de management pratiqué dans l'entreprise influe-t-il sur le type de système à retenir ?

Système de pointage : le cadre juridique

Un système de pointage doit impérativement présenter certaines caractéristiques au regard du droit.

Le cadre juridique des systèmes de pointage est défini par le Code du travail qui impose :

  • des obligations relatives à sa mise en place et à son fonctionnement ;
  • de recueillir et traiter un certain nombre de données pour permettre à l'employeur d'effectuer valablement le contrôle du temps de travail de ses salariés.

Système de pointage : les obligations légales

Voici les quatre obligations qu'un système de pointage doit respecter :

SYSTÈME DE POINTAGE
Obligations à respecter Explications
Proportionnalité en terme de finalité Le choix et la mise en place d'un système de pointage de telle ou telle nature doivent :
  • être justifiés ;
  • et répondre à un impératif qui ne remet pas en cause de façon excessive les droits et libertés individuels et/ou collectifs des salariés dans l'entreprise.

Exemple : à défaut d'exigences importantes en matière de sécurité et de nécessités de contrôle d'accès aux locaux, une pointeuse biométrique identifiant les empreintes digitales ne peut pas être installée dans une entreprise qui fabrique simplement des cartons. Il en serait autrement pour une centrale nucléaire ou une usine de produits chimiques dangereux.

À noter : le 10 avril 2018, la CNIL a précisé sa doctrine pour mieux encadrer les systèmes d’authentification biométrique utilisés par des particuliers dans leur vie quotidienne et inciter les professionnels à veiller à ce que les technologies utilisées garantissent la protection des données personnelles. Dans un règlement type (délib. CNIL 2019-001 du 10 janvier 2019), elle y intègre les principes consacrés par le règlement général sur la protection des données (RGPD), entré en vigueur le 25 mai 2018. Ces règles sont les suivantes : justifier d'un besoin spécifique ; après information, laisser la personne libre d’y recourir ou de choisir un dispositif alternatif ; et maintenir les données biométriques sous le contrôle exclusif de la personne concernée. 

Fiabilité
  • Lorsque le décompte des heures de travail effectuées par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
  • Cela interdit la pratique de l'écrêtage des heures supplémentaires prévu par certains logiciels de pointage.
Facilité d'accès pour les agents de contrôle Le système de pointage doit présenter des conditions de fonctionnement et de traitement des données (dont leur impression sur papier) permettant à l'Inspecteur du travail de vérifier le respect des dispositions légales.
L'entreprise devra :
  • lui présenter le code d'identification de l'ensemble des salariés et des différentes rubriques utilisées ;
  • mettre à sa disposition une personne compétente pour assurer le fonctionnement du système lors du contrôle.
Possibilité d'accès aux données pour les salariés et/ou leurs représentants
  • Les salariés et les membres de la délégation du personnel du comité social et économique peuvent avoir accès aux données de décompte quotidien et hebdomadaire des temps de travail recueillies et traitées par le système de pointage.
  • L'employeur ne peut faire obstacle à ce « droit de savoir ».
Protection des données personnelles

L'employeur qui installe un système de pointage lui permettant de connaitre l’identité des salariés et leur heure d’entrée chaque jour, doit :

  • respecter ses obligations au regard du règlement général sur la protection des données (RGPD) : le règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016, en tenant le registre des traitements de l’entreprise ;
  • consulter les instances représentatives du personnel.

Bon à savoir : le comité social et économique (CSE) doit être informé et consulté préalablement à la décision de mise en œuvre de moyens ou de techniques permettant un contrôle de l'activité des salariés (Cass. soc., 11 décembre 2019, n° 18-11.792).

À défaut, le système est illicite (c'est ce qu'a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt du 2 novembre 2016).

Bon à savoir : la CNIL considère comme excessif et contraire au RGPD le fait de contrôler les horaires de travail du personnel par le biais d'un système de badgeage intégrant une prise de photographie systématique des salariés à chaque pointage (CNIL, communiqué, 27 août 2020).

À noter : avant toute mise en œuvre d’un dispositif d’identification biométrique sur le lieu de travail, l’employeur doit réaliser une analyse d'impact relative à la protection des données personnelles (AIPD). L’employeur doit procéder à une évaluation des risques sur les droits et libertés des personnes aux fins de les identifier et, le cas échéant, de les traiter. L’AIPD doit être mise à jour régulièrement, au moins tous les 3 ans.

Si le système de pointage ne satisfait pas à tout ou partie de ces obligations, sa mise en place, son fonctionnement et le contenu des données qu'il recueille et traite pourront être contestés par l'inspection du travail, les salariés ou leurs représentants.

L'employeur ne pourra pas utiliser les durées du travail enregistrés par le système de pointage pour justifier une décision, par exemple :

  • licencier pour non-respect des horaires ;
  • refuser le paiement d'heures supplémentaires ou de primes ou repos découlant de l'exécution du temps de travail.

Bon à savoir : les juges considèrent que, lorsque les heures supplémentaires d’un salarié sont comptabilisées par un logiciel de pointage, l’employeur a été informé des heures effectuées et a ainsi donné son accord au moins implicite pour la réalisation de ces heures. Par conséquent, ces heures supplémentaires doivent être rémunérées (Cass. soc., 8 juillet 2020, n° 18-23.366).

Système de pointage : données recueillies et traitées

Voici la liste des données qu'un système de pointage doit obligatoirement relever :

SYSTÈME DE POINTAGE
Organisation du temps de travail Récapitulatifs Finalité Bon à savoir
Horaire collectif fixe Pour chaque période journalière travaillée (1) : début et fin, volume horaire.
Récapitulatifs hebdomadaires et mensuels.
  • Paiement salaire.
  • Calcul des heures supplémentaires.
  • Calcul des droits dérivés : congés payés, jours de RTT, participation, intéressement, etc.
  • Particularité pour les heures supplémentaires :
    • décompte d'acquisition et de prise des repos compensateurs dans les délais légaux ;
    • + vérification du dépassement (ou non) des contingents.
Horaire individualisé et/ou variable Décompte « jour » (2) Heure de début et de fin de chaque période travaillée ou nombre total d'heures travaillées.
Récapitulatif mensuel.
Décompte « semaine » (2) Récapitulatif hebdomadaire de toutes les heures travaillées.
Récapitulatif mensuel.
Pratiques horaires et/ou organisations spécifiques Heures supplémentaires (2) Récapitulatif hebdomadaire + mensuel + annuel du nombre d'heures effectuées.
Annualisation et/ou cycles (2) Récapitulatif hebdomadaire+ mensuel + annuel des périodes travaillées effectuées (heures et/ou jours et/ou semaines).
Astreintes Récapitulatif hebdomadaire + mensuel des heures travaillées.
  • Paiement du salaire.
  • Calcul des majorations et/ou repos compensateurs si heures supplémentaires.
 
Travail de nuit et/ou des jours fériés et/ou chômés Récapitulatif hebdomadaire + mensuel :
  • heures travaillées si travail de nuit ;
  • jours travaillés si travail un jour férié et/ou chômé.
Calcul des majorations et/ou repos de compensateurs.  

(1) Hors pauses et temps non travaillés sauf usage ou accord collectif prévoyant le contraire mais en incluant les périodes équivalentes à du temps de travail effectif. Les périodes légalement assimilées à du travail effectif, telles que les heures de délégation des représentants du personnel, doivent également être prises en compte.

(2) La durée du travail qui doit être décomptée correspond au temps de travail avant application des équivalences mais exclusion faite des temps de pause, d'habillage, de repas sauf si ces temps d'inaction sont qualifiés de temps de travail effectif par usage ou accord collectif. Les périodes légalement assimilées à du travail effectif, telles que les heures de délégation des représentants du personnel, doivent également être prises en compte.

L'absence de pointage et de tenue des décomptes relatifs à la durée du travail est pénalement sanctionnée :

  • l'employeur défaillant peut-être condamné au paiement d'amendes ;
  • il y a autant d'amendes à payer que de salariés dont les temps de travail ne font pas l'objet de pointage.

Bon à savoir : en cas d'allègement de cotisations, toutes les heures donnant lieu à allègement doivent faire l'objet d'un récapitulatif hebdomadaire.

Système de pointage : faire un audit avant de choisir

Le choix d'un système de pointage doit résulter d'un audit préalable permettant d'identifier les problèmes et besoins et imaginer les solutions.

Besoins de l'entreprise

Cet audit doit permettre d'analyser ses besoins et attentes considérant les tailles et organisations de son entreprise avant de faire un choix et, partant, exposer une plus ou moins grande dépense :

SYSTÈME DE POINTAGE : L'AUDIT
Qui peut le réaliser ? Sur quoi porte-t-il ? Faut-il en réaliser plusieurs ?
L'employeur seul s'il possède des compétences en matière d'organisation, d'informatique et de droit du travail.
  • Effectif, durée du travail pratiquée.
  • Activité de l'entreprise et produit et/ou service qu'elle vend et/ou met au point et/ou fabrique.
  • Complexité ou non de l'organisation du travail :
    • Horaire fixe invariable pour tout le monde ?
    • Planning facilement prévisible ou non ?
    • Fréquence des changements d'horaires ?
    • Horaires variables ?
    • Travail en équipe et/ou cycle ?
    • Nombreuses heures supplémentaires ou non ?
    • Astreintes fréquentes ou non ? etc.
  • Flexibilité et modules disponibles sur le logiciel d'exploitation du système de pointage.
  • Organisation du travail en vigueur.
  • Savoirs et compétences disponibles (ou non) en interne pour faire fonctionner et exploiter les données fournies par tel ou tel type de système.
  • Besoins en matière de formation (en fonction de ce qui précède).
  • Non : si l'employeur crée son système lui-même.
  • Oui : si l'employeur met en concurrence plusieurs fournisseurs. La phase « audit » permet de juger le sérieux (ou non) et la logique commerciale du fournisseur si ce dernier veut vendre à tout prix la solution la plus chère même si elle n'est pas adaptée.
L'employeur assisté d'un conseil en organisation.
L'employeur assisté d'un fournisseur de système de pointage.

Audit des contrats et des réalités

L'introduction d'un système de pointage rigoureux fera nécessairement apparaître les dysfonctionnements en termes de gestion du temps de travail, notamment si les horaires réels de certains salariés diffèrent sensiblement de leurs horaires contractuels.

Il conviendra donc de faire un audit de la réalité du temps de travail des salariés. À défaut, le système de pointage pourra faire apparaître des heures supplémentaires ou des heures à rattraper en grande quantité.

Exemple : une boutique ferme à 19 h 00. Le contrat du salarié qui assure la fermeture prévoit un départ à 19 h 15, mais il faut systématiquement 30 minutes pour tout ranger et clôturer la caisse avant de pouvoir partir. Au bout d'un mois, cela fait 5 heures de dépassement, et au bout d'un an 50 heures, soit une semaine et demie de temps excédentaire.

La mise en place d'un système de pointage nécessite donc généralement :

  • de signer des avenants aux contrats pour qu'ils correspondent aux réalités du temps de travail (par exemple, si un salarié finit systématiquement trop tard, le faire arriver plus tard ou lui accorder un pause repas plus longue) ;
  • de signer un accord sur le temps de travail qui prévoira :
    • le non-décompte des horaires au-delà d'un délai de marge (30 minutes ou 1 heure après l'heure limite contractuelle), sauf ordre écrit de faire des heures supplémentaires ;
    • l'obligation pour le salarié de régulariser son temps total de travail sur la quinzaine ou sur le mois, afin de ne pas laisser courir des excédents d'heures, le surplus étant perdu.

Système de pointage : quel investissement ?

En plus de l'audit et de la situation qu'il révèle, le choix d'un système de pointage résulte aussi de la politique d'investissements de l'employeur.

L'employeur qui cherche à se doter d'un système de pointage va se poser des questions sur :

  • le coût que cela représente ;
  • le retour sur investissement : le matériel pourra-t-il s'adapter à l'évolution de l'entreprise (croissance de l'effectif, complexification de l'organisation du travail, etc.) ?
  • l'optimisation du matériel :
    • Quelle difficulté d'utilisation du matériel, par exemple s'il a de nombreuses fonctionnalités ?
    • Le matériel permet-il de recueillir et exploiter des données en liaison et compatibilité avec d'autres systèmes comme un progiciel de gestion intégré (type ERP) pour travailler en workflow (gestion des flux) notamment :
      • si une comptabilité analytique existe ou va être introduite ;
      • si l'entreprise pratique du cost killing (réduction des coûts) ?

Ces pros peuvent vous aider