La période probatoire permet à l'employeur d'évaluer l'adaptation d'un salarié à des fonctions nouvelles suite à un changement de fonctions.
La période probatoire est une des clauses que peut comporter le contrat de travail, au même titre que :
- la clause de dédit-formation ;
- la clause de mobilité du contrat de travail ;
- la clause d'exclusivité du contrat de travail ;
- la clause de non concurrence ;
- la clause de confidentialité du contrat de travail ;
- la clause de forfait heures ou jours pour les cadres.
Période probatoire : différente de la période d'essai et de l'essai professionnel
Si la période probatoire, la période d'essai et l'essai professionnel consistent à apprécier si employeur et salarié font le bon choix pour une nouvelle activité professionnelle, la ressemblance s'arrête là : circonstances et régime juridique sont très différents.
La période d'essai intervient en tout début de contrat de travail lors du recrutement. La période probatoire intervient alors que le salarié est déjà recruté, et alors qu'il exerce déjà une activité professionnelle pour son employeur. Simplement, il change de poste ou d'affectation au sein de l'entreprise. L'essai professionnel intervient, quant à lui, avant toute embauche et permet uniquement à un employeur de tester les compétences d'un candidat pendant quelques heures ou quelques jours au plus.
Les effets sont différents : la période d'essai peut donner lieu sans motif à une rupture du contrat de travail. Lequel ne sera donc pas poursuivi. L'échec de la période probatoire ne conduit pas en revanche à la fin de la relation travaillée et/ou au licenciement. Le salarié reprends ses activités antérieures et le contrat de travail est poursuivi comme par le passé. L'essai professionnel prend fin à tout moment.
Bon à savoir : lorsqu'un salarié déjà présent en entreprise change simplement de poste ou de fonction chez le même employeur, il n'est pas possible de lui imposer un essai. Seule, une période probatoire peut être éventuellement convenue (Cass. soc., 30 mars 2005, n° 03-41.797). Le risque à vouloir imposer coûte que coûte un essai dans ces circonstances, surtout s'il y a rupture du contrat de travail pendant le prétendu essai, sera nécessairement à la requalification de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Évaluation du salarié en période probatoire
La période probatoire est un outil de ressources humaines utilisé par l'employeur dans des situations où un salarié accède à des fonctions nouvelles, à l'occasion d'un changement de poste/d'emploi (mutation, réorganisation d'entreprise, promotion, etc.).
Cette période vise à évaluer, mesurer et donner une suite positive ou négative à l'exercice des nouvelles fonctions du salarié au cours de la relation contractuelle de travail (modification d'un contrat préexistant, nouveau contrat de travail et/ou signature d'un avenant comportant la période probatoire).
Cette période permet à l'employeur de s'assurer que le salarié sera parfaitement compétent et adapté au nouveau poste et/ou sur sa nouvelle activité.
Important : il faut lire la convention collective applicable, notamment pour savoir si l'accord interdit une telle clause. Et savoir dans le cas contraire quelles seront les modalités organisées éventuellement par ce texte pour une telle période.
Période probatoire : ni prévue ni organisée par le Code du travail
Contrairement à la période d'essai, qui est strictement encadrée par le Code du travail, la période probatoire ne fait l'objet d'aucune définition légale et il n'y a aucune disposition la concernant dans le Code du travail.
Elle résulte :
- du contrat de travail signé éventuellement avec le changement de poste, ou l'un des avenants au contrat de travail initial. Quelles que soient les circonstances, le régime juridique restera le même ;
- éventuellement d'une convention collective qui peut la prévoir et l'organiser, ou au contraire l'interdire. S'il n'y a pas d'interdiction conventionnelle, il faudra quand même inscrire une clause dans le contrat de travail ou l'un de ses avenants ;
- de l'accord du salarié et de l'employeur.
Mise en œuvre de la période probatoire
La clause de période probatoire doit par précaution notamment, pour l'information parfaite des parties, et au titre du régime de la preuve en tant que de besoin, comporter des mentions spécifiques écrites : durée, objectifs à atteindre, mesure des progrès, éventuel tutorat ou formation, etc.
Clause de période probatoire Lire l'articleVoici le contenu indicatif d'une clause de période probatoire.
Motif de recours à la clause de période probatoire
Il faut justifier des raisons poussant l'employeur à utiliser ce type de période pour permettre la mesure de l'adéquation individu/fonctions à exercer.
Exemple : à l'occasion d'un changement de fonctions, une réorganisation d'entreprise, etc.
Durée de la période probatoire
Il faut indiquer la durée en jours, semaines ou mois ainsi que l'éventualité ou non du renouvellement de la période elle-même.
Bon à savoir : à la différence de la période d'essai, la période probatoire n'est ni définie, ni limitée par un plafond inscrit dans l'un des articles du Code du travail. Pour autant, la durée de cette période devra donc rester raisonnable. Ce qui en cas de discussion se fera sous l'appréciation souveraine des juges du fonds du conseils des prud'hommes. Les durées plafond du Code du travail pour l'essai du salarié temps plein en CDI, pourront servir de référence raisonnable. Que ce soit d'ailleurs pour la durée initiale et/ou un renouvellement éventuel.
Préciser les objectifs à atteindre
Pour mesurer la réussite de la période probatoire, il faut indiquer les critères :
- matériels et objectifs (chiffrables) ;
- d'évaluation du comportement et du professionnalisme du salarié.
Encadrement, formation et suivi mis en place
On mettra en place un dispositif d'encadrement du salarié avec tuteur, référent, etc. avec, selon les cas, un éventuel dispositif de formation afin d'accompagner et permettre la progression du salarié. De même, il sera nécessaire de définir des entretiens réguliers avec le salarié afin de :
- mesurer l'atteinte ou non des objectifs ;
- mesurer les progrès accomplis par le salarié ;
- évoquer les éventuelles difficultés rencontrées par le salarié ;
- apporter des correctifs aux objectifs et/ou des compléments sous forme de moyens nouveaux en encadrement, formation, etc.
Validation de la période ou non
S'il y a confirmation du salarié dans ses nouvelles fonctions, il faut spécifier éventuellement l'augmentation de salaire, la nouvelle position dans la classification, le nouveau statut, etc.
Inversement, on indiquera les conséquences en cas d'invalidation ou dénonciation de la période, notamment le retour aux fonctions antérieurement exercées.
Information nécessaire du salarié et signature
Le salarié doit être informé sur la mise en œuvre de la période ainsi que sur la décision de l'employeur s'il entend mettre un terme à la période probatoire avec retour au statu quo ante.
L'avenant au contrat de travail ou le nouveau contrat de travail doivent être signés sans aucune réserve et sans qu'il puisse y avoir incertitude sur la décision du salarié
L'écrit éventuellement formalisé par un recommandée avec AR (pour la dénonciation de la période probatoire) reste un mode de preuve souvent nécessaire.
Validité de la période probatoire
La période probatoire doit intervenir pendant le cours d'un contrat de travail qui existe déjà. Elle peut intervenir pendant une période d'essai s'il y a changement d'affectation et de fonction.
Attention : pour la Cour de cassation, cette succession de période concurrente mets nécessairement fin à la période d'essai. Même si cette dernière ne s'est pas entièrement écoulée. Il suffit que la période probatoire morde aussi peu que ce soit sur le reste à courir de l'essai. Ainsi : « en présence d'un avenant stipulant une période probatoire pour l'exercice de nouvelles fonctions, la période d'essai prévue dans le contrat de travail du salarié engagé pour occuper d'autres fonctions a nécessairement pris fin » (Cass. soc., 20 octobre 2010, n° 08-42.805). Le contrat de travail devient donc définitif du fait de l'existence de cette période probatoire.
Le salarié doit effectivement et réellement être affecté sur un nouveau poste et/ou prendre de nouvelles fonctions ou activités.
En cas de défaut, la période probatoire pourrait être réputée inexistante, le salarié étant en conséquence définitivement affecté sur son nouveau poste et/ou dans ses nouvelles fonctions.
Bon à savoir : comme pour l'essai, l'accord du salarié ne doit souffrir d'aucune incertitude. Il doit être exprès, clair et non ambiguë. Ainsi notamment, « si au cours de l'exécution du contrat de travail, l'employeur peut assortir sa décision d'affectation d'un salarié à un nouveau poste de travail emportant modification du contrat de travail d'une période probatoire, une telle condition requiert l'accord exprès du salarié » (Cass. soc., 16 mai 2012, n° 10-10.623). Dans le même sens : Cass. soc., 16 mai 2012, n° 10-24.308).
Fin de la période probatoire
Succès : non dénonciation de la période probatoire
À l'issue de la période probatoire, en l'absence de dénonciation, la période sera réputée avoir eu une issue satisfaisante. Le salarié sera alors définitivement affecté sur le nouveau poste ou dans la nouvelle fonction.
Échec de la période probatoire
L'échec n'entraîne pas les mêmes conséquences pour une période probatoire et une période d'essai.La période d'essai jugée non concluante par l'employeur entraîne la rupture du contrat de travail du salarié sans procédure ni obligation de justifier par écrit la décision (sauf convention collective prévoyant des garanties de protection particulières pour le salarié).
Bon à savoir : la rupture de la période d’essai n’est soumise à aucun formalisme. Néanmoins, les juges considèrent qu’elle doit être faite de manière explicite par l'employeur. À défaut, l’employeur aura des difficultés à établir qu’elle est intervenue dans les temps (Cass. soc., 24 juin 2020, n° 17-28.067).
En revanche, lorsque la période probatoire est dénoncée, la rupture du contrat de travail n'est pas automatique. L'échec ne constitue pas un motif de licenciement en lui-même. Le salarié sera donc nécessairement réintégré sur son poste antérieur.
Bon à savoir : le contrat de travail (ou l'un de ses avenants) ne peut pas prévoir que la dénonciation de la période probatoire pourra donner lieu à licenciement. Ainsi notamment, « un salarié ne peut valablement renoncer, pendant la durée du contrat, par avance, au droit de se prévaloir des règles légales du licenciement » (Cass. soc., 30 mars 2005, n° 02-46.103).
Cas particulier du salarié protégé
L'échec de la période probatoire sera considéré avec la plus grande prudence : le salarié ne devra pas être replacé dans son poste antérieur, sauf s'il y consent clairement et avec certitude. Si ce n'est pas le cas, il devra être maintenu sur le nouveau poste, et le retour sur le poste antérieur sera prudemment soumis à autorisation préalable de l'inspecteur du travail.
Clause de période probatoire et licenciement
Si le salarié est par principe réintégré sur son poste antérieur lorsque la période probatoire est dénoncée, pour autant il peut quand même y avoir licenciement à l'occasion ou du fait d'une clause probatoire si certaines conditions sont remplies.
Les principes du licenciement disciplinaire ne sont pas réduits parce qu'il y a une période probatoire. Le salarié reste soumis aux mêmes règles et exposé aux mêmes sanctions. Il peut donc être licencié pour motif disciplinaire.
En revanche, l'essence et la nature même de la période probatoire empêchent qu'un salarié en situation d'échec sur ses affectations nouvelles pendant le cours d'une période probatoire soit licencié pour insuffisance professionnelle : l'employeur doit tirer toutes les conséquences de l'échec, dénoncer la période probatoire, et ré-affecter son salarié sur ses activités ou son poste antérieurs. La période probatoire n'interdit pas non plus les licenciements pour motifs économique.
Le salarié peut enfin être licencié après l'échec d'une période probatoire s'il refuse de réintégrer son poste et/ou son affectation antérieure.
Bon à savoir : l'employeur qui refuserait la réintégration du salarié sur son ancien poste s'exposera au risque de censure judiciaire. La rupture sera requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse. La prudence sera donc de ne pas procéder trop rapidement au remplacement définitif sur le poste qui était jusqu'alors occupé par le salarié promu. Si la période probatoire n'est pas concluante, le salarié sera réaffecté dans son emploi antérieur. Le risque à trop vouloir se précipiter est donc qu'il puisse y avoir ensuite pluralité de salariés sur un même poste. Ce qui peut évidemment créer des difficultés à tous les niveaux.
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Principes du contrat de travail
Sommaire
- Régimes juridiques et lois
- Existence du contrat de travail
- Clauses du contrat de travail
- Modification du contrat de travail