Le départ négocié est un mode de rupture du contrat de travail. La rupture du contrat de travail peut être à l'initiative du salarié ou de l'employeur.
Il existe différents types de rupture d'un contrat de travail dont le départ négocié, la démission, le départ à la retraite, la rupture anticipée de CDD, du contrat d'apprentissage et du contrat de professionnalisation.
Départ négocié : un mode de rupture du contrat de travail
Le départ négocié permet d'arrêter l'exécution du contrat de travail : il ne résout pas les litiges. Le départ négocié est un outil de ressources humaines et juridique qui permet de constater et d'organiser la rupture du contrat de travail.
Le départ négocié : rompre le contrat de travail en toutes circonstances
Le départ négocié peut être utilisé :
- dans un cadre légal de départ : par exemple, un départ négocié permettant d'organiser la rupture anticipée et par accord commun du contrat d'apprentissage, du contrat de professionnalisation ou du CDD ;
- ou en-dehors de tout cadre légal : départ négocié permettant de mettre fin à un CDI.
Cas pour lesquels le départ négocié ne peut pas être utilisé
Le départ négocié ne peut pas être utilisé pour :
- prévenir la survenue d'un litige et/ou d'une contestation entre employeur et salarié relativement à l'exécution et/ou la rupture du contrat ;
- mettre fin définitivement à un litige et/ou une contestation entre employeur et salarié relativement à l'exécution et/ou la rupture du contrat.
Le rôle de prévention et/ou d'extinction des litiges est réservé à la transaction.
Départ négocié : accord des 2 parties
Le départ négocié ne peut être signé que par des parties :
- qui s'accordent et qui consentent librement et sereinement ;
- non pas par des parties en litige qui s'affrontent ouvertement ou de façon larvée.
À noter : étant un mode de rupture, le départ négocié rend la rupture irrévocable et définitive sans possibilité de retour en arrière et/ou de droit à rétractation.
Le départ négocié : même nature et valeur qu'un contrat
Juridiquement, le départ négocié est un contrat : sa conformité est conditionnée par la validité et la liberté de consentement des parties signataires.
Pour être valable, le départ négocié doit présenter un certain nombre de caractéristiques dont la plupart sont en relation avec sa nature de contrat.
Caractéristiques principales du départ négocié pour être valide
Le départ négocié découle :
- d'un accord entre deux parties ;
- de la capacité de deux parties à pouvoir conclure un engagement ;
- de la nécessité d'unir deux volontés et consentements libres.
En-dehors de ces conditions, il n'y a pas de départ négocié
À défaut de présenter ces caractéristiques, le départ négocié pourra être :
- privé de toute valeur et donc sans effet ;
- requalifié par le juge du conseil de prud'hommes en licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse avec obligation d'indemnisation du salarié par l'employeur.
Cette requalification provient du fait que :
- comme le départ du salarié n'est pas le résultat de sa libre volonté de quitter l'entreprise ;
- on considère que le contrat de travail est rompu sur seule décision et volonté de l'employeur.
Conditions de validité du départ négocié
Volonté commune des parties de mettre fin au contrat de travail
La volonté du salarié + celle de l'employeur doivent être impérativement :
- communes et partagées ;
- claires et non équivoques.
Absence de litige et contentieux
La volonté commune de rupture ne peut ni être affectée ni être conditionnée par un affrontement ou un différend.
Exemple : sanction disciplinaire ayant précédé de peu la négociation du départ ou licenciement prévu ou en cours.
Capacité juridique des parties à négocier et conclure un départ
L'employeur et le salarié doivent pouvoir s'engager valablement. Un majeur sous tutelle ou un mineur non émancipé (cas d'un apprenti) ne peuvent conclure seuls un départ négocié.
Validité du consentement et de la volonté des parties
Employeur et salarié doivent décider librement et valablement de mettre fin au contrat et d'en organiser les conséquences en dehors de toute :
- pression ;
- contrainte ;
- affirmations et/ou présentations mensongères, etc.
Chaque partie doit pouvoir s'engager volontairement et sereinement sans être abusée, trompée ou contrainte par l'autre partie concernant :
- le principe de la rupture elle-même ;
- les conséquences juridiques et financières de la rupture.
Le salarié signataire doit donc être parfaitement informé des conséquences de son engagement voire pouvoir se faire conseiller.
Portée limitée du départ négocié
Le départ négocié ne peut pas :
- permettre de renoncer à un droit et/ou une garantie prévue par la loi et/ou la convention collective ;
- écarter le respect des dispositions légales et/ou conventionnelles impératives.
Exemples : un employeur ne peut utiliser un stratagème à base de départ négocié pour contourner la législation sur le licenciement et ne pas avoir à licencier et indemniser un salarié. Un salarié en arrêt maladie pour accident du travail ou en état de grossesse ne peut renoncer, par départ négocié, à son droit à la protection et/ou au maintien de son contrat de travail. Un salarié partant de l'entreprise pour motif économique ne peut renoncer, par départ négocié, au bénéfice d'une convention de reclassement personnalisé.
À noter : le départ négocié régulièrement conclu limite le droit du salarié de contester postérieurement régularité, légitimité et indemnisation de la rupture de son contrat de travail.
Pas de procédure pour le départ négocié sauf certains cas
En cas de départs collectifs liés à un contexte économique, le départ négocié doit suivre une procédure et des délais spécifiques.
Le Code du travail ne prévoit ni procédure ni délai relatifs à la négociation et à la conclusion du départ négocié. Cela est vrai même si le départ négocié est utilisé pour rompre de façon anticipée un contrat aussi réglementé que le contrat d'apprentissage.
À noter : il peut toutefois exister une procédure à suivre en cas de disposition d'une convention collective venant apporter précisions et exigences particulières.
Exception : départ négocié et plan de sauvegarde de l'emploi
Lorsque le départ négocié fait partie d'un plan de sauvegarde de l'emploi, il est soumis au cadre général (étapes et délais) de la procédure de licenciement économique d'au moins dix salariés. Il ne peut donc être conclu que dans les derniers moments de la procédure et non pas avant qu'elle ne se soit achevée.
Bon à savoir : suite à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, les entreprises peuvent également avoir recours à la rupture conventionnelle collective. Les modalités de cette rupture conventionnelle sont définies par un accord collectif, lequel doit être validé par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE), en application du décret n° 2017-1723 du 20 décembre 2017. L'employeur est à l'initiative de la négociation de l'accord collectif portant la rupture conventionnelle et le salarié peut se porter candidat s'il répond aux conditions fixées par l'accord.
Départ négocié : de préférence formalisé par écrit
Le départ négocié nécessite la rédaction et la signature d'un écrit pour matérialiser l'accord mutuel des parties et leurs engagements réciproques.
Le départ négocié entérine l'accord et la volonté réciproque de l'employeur et du salarié pour :
- rompre leur relation contractuelle ;
- organiser les conditions juridiques, matérielles et financières de la rupture du contrat de travail.
Écrit : pas obligatoire mais conseillé pour le départ négocié
Malgré l'absence de toute obligation légale directe, le bon sens commande de rédiger et signer un écrit.
Cela doit être fait pour des raisons de transparence et de preuve de l'accord des parties :
- quant à la rupture définitive de leur relation contractuelle ;
- quant aux engagements réciproques pris relativement à l'organisation et aux conséquences de ladite rupture.
Départ négocié : contenu du protocole
Voici, en bref, ce que doit comporter l'accord de départ négocié :
Mentions | Recommandations |
---|---|
Identification des parties signataires |
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Préambule rappelant les circonstances à l'origine du départ du salarié |
Énoncé du contexte et des circonstances à l'origine de la négociation et de l'accord des parties quant :
Les faits ne doivent pas laisser transparaître l'idée que l'employeur a tout mis en œuvre pour obtenir le départ du salarié :
Important : le départ négocié ne peut pas être utilisé par l'employeur pour contourner la législation sur le licenciement et ne pas avoir à licencier et indemniser un salarié. |
Départ inclus dans une procédure de licenciement économique avec plan de sauvegarde de l'emploi |
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Mention du principe de la rupture par accord commun | Il est essentiel de souligner que :
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Énoncé du dispositif des modalités d'organisation du départ article par article |
Chaque accord de départ négocié implique un dispositif particulier selon le contexte et la volonté des parties. Les indications suivantes constituent un minimum non exhaustif :
Bon à savoir : la loi Pacte (loi n° 2019-486 du 22 mai 2019) a créé un nouveau produit d'épargne retraite : le PER (plan d'épargne retraite) qui peut être individuel, d'entreprise collectif et d'entreprise obligatoire. Il remplace notamment le PERP, le PERCO, le PERE (article 83) et les contrats Madelin depuis le 1er octobre 2019. Ces produits ne sont plus commercialisés depuis le 1er octobre 2020. Ils peuvent continuer à être alimentés par les épargnants ou bien être transformés en PER. |
Rappel du caractère contractuel donc obligatoire du contenu de l'accord | Il doit être fait mention que le protocole d'accord de départ négocié :
À noter : le départ négocié peut toutefois être contesté en cas de fraude, consentement du salarié non valable ou détournement de son objet (départ négocié utilisé pour contourner les règles du licenciement). |
Espace pour les signatures |
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Départ négocié : pas toujours allocations-chômage
Souvent assimilé à une démission, le départ négocié n'ouvre pas systématiquement au bénéfice des allocations chômage sauf exception et/ou accord de Pôle emploi.
Le bénéfice des allocations-chômage est réservé aux salariés privés involontairement d'emploi (= de contrat de travail).
Avec le départ négocié, le salarié prend part à la décision/initiative de rupture du contrat de travail :
- la rupture n'est pas involontaire ;
- le salarié est privé du droit aux allocations-chômage.
Exceptions : allocations accordées dans certains cas de départ négocié
Voici les cas dans lesquels le départ négocié peut donner droit aux allocations chômage :
- Un départ négocié rattaché à un licenciement économique.
- Un départ négocié lié à une situation de démission légitime (par exemple : départ pour suivre un conjoint muté géographiquement qui déménage).
Bon à savoir : les cas de démission légitime sont définis par l'article 2 du règlement annexé au décret n° 2019-797 du 26 juillet 2019 relatif au régime d'assurance chômage.
- Un départ négocié lié à une rupture anticipée de CDD donne droit aux allocations-chômage si c'est l'employeur qui est à l'initiative de la rupture.
- Un départ négocié lié à une rupture anticipée de contrat d'apprentissage donne droit aux allocations-chômage si l'employeur est à l'initiative de la rupture.
Important : avant toute signature de départ négocié, il faut questionner et solliciter l'avis de Pôle emploi avec réponse écrite.
Indemnités départ négocié : parfois soumises à des taxes
Parce qu'elles se rattachent à un mode de rupture souvent assimilé à une démission, les indemnités de départ versées au titre du départ négocié risquent d'être soumises à charges et impôts :
Nature du départ | Charges sociales | CSG-CRDS | Impôts-taxes sur salaire |
---|---|---|---|
Départ négocié en lien avec un licenciement économique avec plan de sauvegarde de l'emploi | Non (1) | Non (1) | Non (1) |
Départ négocié sans lien avec un licenciement économique avec plan de sauvegarde de l'emploi | Oui (2) | Oui (2) | Oui |
(1) La partie de l'indemnité qui excéderait (soit l'équivalent du montant de l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement, soit a ou b seraient intégralement soumise à charges, taxes sur salaire et impôt (IR). Sachant que a = 2 × la rémunération annuelle brute du salarié durant l'année civile précédant la rupture et que b = 50 % du montant de ladite indemnité à condition que ces 50 % ne soient pas > 6 fois le plafond annuel de la Sécurité sociale.
(2) Exception : si on peut démontrer que l'indemnité de départ versée au salarié répare un réel préjudice né de la rupture du contrat, l'indemnité a la nature de dommages-intérêts et n'a pas à subir de prélèvement au titre des charges et CSG-CRDS pour sa part non-imposable (6 fois le plafond annuel de la Sécurité sociale) et dans la limite de 2 fois le plafond annuel de la Sécurité sociale).
Important : avant toute signature de départ négocié, questionner et solliciter l'avis du FISC + URSSAF avec réponse écrite et circonstanciée.
Départ négocié : formalités obligatoires de fin de contrat
Le départ négocié entraîne la rupture du contrat de travail et donc le déclenchement, pour l'employeur, d'obligations et de formalités propres à la fin d'un contrat de travail.
Pour l'employeur
Formalités à accomplir
Remise au salarié :
- dernier bulletin de paie ;
- certificat de travail ;
- attestation Pôle emploi ;
- reçu pour solde de tout compte ;
- état récapitulatif de l'épargne salariale (si intéressement, participation, PEE, PEI, PER ou PERCO dans l'entreprise).
Vérifications et diligences
Si cela n'est pas réglé dans et par le protocole de départ négocié : examen des effets des clauses du contrat de travail qui vont s'appliquer.
Le problème du remboursement par le salarié à l'employeur d'un certain nombre de sommes peut également se poser : avances sur salaire, prêts, etc.
Sommes à payer au salarié
Paiement au salarié :
- éventuelle indemnité de fin de contrat (si CDD) ;
- éventuelle indemnité spécifique de départ compensant la rupture du contrat (CDI ou CDD) ;
- éventuelle indemnité compensatrice de préavis ;
- indemnité compensatrice de congés payés ;
- prorata (s'il est prévu) de primes et gratifications prévues par la convention collective, le contrat de travail lui-même, un usage, etc.
- paiement d'heures supplémentaires et/ou régularisation de solde de repos compensateur ;
- solde des jours de RTT ;
- solde et liquidation du compte épargne temps (sauf transfert) ;
- régularisation des droits acquis (ou des dettes) du salarié en cas de présence dans l'entreprise d'un dispositif dérogatoire à la durée du travail (modulation, cycle, forfait annuel en heures ou jours, etc.) ;
- épargne salariale (si demande de déblocage de la part du salarié).
À noter : s'il y a une clause de non-concurrence produisant ses effets, l'employeur devra dès le lendemain de la fin de l'exécution du contrat de travail commencer à verser la contrepartie financière au salarié respectant l'engagement de non-concurrence.
Pour le salarié
Obligations de restitution
Le salarié partant de l'entreprise est tenu de lui restituer les biens et/ou matériel qui ont été mis à sa disposition (véhicule de fonctions, ordinateur, etc.).
Important : la non-restitution par le salarié peut l'exposer à poursuites judiciaires et condamnation.
Obligations de remboursement
Si le salarié est débiteur de sommes d'argent à l'employeur.
Aussi dans la rubrique :
Rupture du contrat d'un commun accord
Sommaire
- Rupture conventionnelle
- Rupture du CDD d'un commun accord
- Départ à la retraite