
Il peut arriver à un salarié de tomber malade et d'être arrêté pour ce motif par son médecin. Mais que se passe-t-il lorsque les arrêts maladie d'un même salarié se répètent ou qu'ils se prolongent ? Le salarié peut-il être licencié pour ses absences répétées ou prolongées ?
Absences prolongées ou répétées pour maladie et licenciement d'un salarié
En aucun cas la maladie d'un salarié ne peut justifier un licenciement (article L. 1132-1 du Code du travail). Si l'employeur passe outre cette règle et qu'il décide de licencier un collaborateur en raison de sa maladie, le licenciement est considéré comme discriminatoire.
Néanmoins, sous certaines conditions très strictes, la longueur et la répétition des absences peuvent justifier le licenciement du salarié concerné.
Sous quelles conditions le licenciement peut-il être envisagé ?
Licencier un salarié est envisageable, si et seulement si, les absences prolongées ou répétées de celui-ci :
- perturbent le fonctionnement de l'entreprise (surcharge de travail des autres salariés, mécontentement des clients, retards de livraison, etc. ; Cass. soc., 12 janvier 2016, n° 14-17.642) ;
- engendre la nécessité de le remplacer définitivement (Cass. soc., 30 juin 1993, n° 90-44165) : le nouveau salarié doit impérativement être embauché sous CDI et être recruté pour une durée de travail équivalente à celle du salarié malade. Cette obligation n'est pas remplie si :
- les fonctions du salarié malade sont assumées par un autre ou plusieurs salariés de l'entreprise ;
- la date de l'embauche du salarié n'intervient pas dans un délai raisonnable suivant le licenciement du salarié absent ;
- ne sont pas consécutives à un accident du travail ou une maladie professionnelle ou un manquement de l'employeur à son obligation de préserver la santé et la sécurité du salarié.
Ces conditions sont cumulatives.
À noter : la mention de la perturbation d’un service dans la lettre de licenciement, sans indiquer que ce service est essentiel dans l’entreprise, ne vaut pas automatiquement licenciement sans cause réelle et sérieuse dès lors que les éléments de preuve fournis par l’employeur révèlent que les absences répétées perturbaient bien l’entreprise dans son ensemble (Cass. soc., 5 février 2020, n° 18-17.394).
Bon à savoir : en cas de licenciement suite à la perturbation du fonctionnement de l'entreprise en raison de l'absence prolongée du salarié, si l'absence du salarié résulte du harcèlement moral de la part de l'employeur, la nullité du licenciement peut être prononcée (Cass. soc., 30 janvier 2019, n° 17-31.473).
Une clause de garantie d'emploi est-elle applicable à la relation contractuelle ?
Il convient également de consulter les dispositions conventionnelles ou contractuelles applicables à la relation de travail car elles peuvent comporter une garantie d'emploi.
Il n'est pas du tout rare qu'une convention collective prévoit une clause de garantie d'emploi qui s'applique en cas d'arrêt de travail pour maladie du salarié et qui a pour but d'interdire l'employeur de licencier le salarié avant l'expiration de la période de garantie définie.
Exemple : CCN de la pharmacie d'officine : l'article 16 prévoit que, dans le cas où les absences pour maladie imposeraient le remplacement définitif de l'intéressé, les employeurs s'engagent à ne procéder à un tel remplacement définitif qu'en cas de nécessité après une période de 4 mois d'absence au cours des 12 derniers mois (pour les salariés ayant moins de 2 ans d'ancienneté) ou de 6 mois d'absence au cours des 12 derniers mois (pour les salariés ayant 2 ans et plus d'ancienneté).
Exemple : CCN des experts-comptables et commissaires aux comptes : l'article 7.2 institue une protection du salarié malade en interdisant à l'employeur d'engager la procédure de licenciement pendant les six premiers mois d'absence du salarié pour cause de maladie.
L'employeur qui licencie le salarié malgré une clause de garantie d'emploi contenue dans la convention collective prend le risque que le salarié demande au Conseil de prud'hommes de considérer son licenciement comme privé de cause réelle et sérieuse au regard du motif invoqué (Cass. soc., 29 juin 2011, n° 10-11.052, Cass. soc., 23 janvier 2013, n° 11-28.303).
Lorsque c'est le contrat de travail qui prévoit la clause de garantie d'emploi, l'employeur doit en cas de non-respect de cette garantie verser au salarié l'indemnité prévue par la clause. Si le montant de l'indemnité n'est pas fixée alors l'employeur peut avoir à verser à l'intéressé l'ensemble des salaires qu'il aurait perçus jusqu'à la fin de la période couverte par la garantie d'emploi (Cass. soc., 27 octobre 1998, n° 95-43.308).
Procédure de licenciement à suivre face aux absences répétées d'un salarié malade
L'employeur est tenu de respecter la procédure mentionnée aux articles L. 1226-2-1 et L. 1226-12 du Code du travail.
La convocation du salarié concerné à un entretien préalable
La convocation se fait soit :
- par lettre recommandée avec accusé de réception ;
- par lettre remise en main propre contre décharge.
Cette lettre indique son objet (article L. 1232-2 du Code du travail) et mentionne la possibilité dont dispose le salarié de recourir à un conseiller (article L. 1232-4 du Code du travail).
L'entretien préalable
L'entretien préalable se tient au moins 5 jours ouvrables après la présentation de la convocation.
L'employeur indique au salarié les motifs du licenciement, c'est-à-dire que ses absences répétées ou prolongées perturbent le bon fonctionnement de l'entreprise et qu'il est contraint de le remplacer définitivement.
À noter : le fait que salarié ne se présente pas à l'entretien n'empêche en rien la poursuite de la procédure.
La notification du licenciement
La notification du licenciement se fait par lettre recommandée avec avis de réception, laquelle comporte l'énoncé précis des motifs du licenciement (article L. 1232-6 du Code du travail). Elle doit donc expliquer précisément en quoi l'absence du salarié perturbe l'entreprise et pourquoi son remplacement définitif s'impose. Un délai d'au moins 2 jours ouvrables après la date prévue de l'entretien préalable doit être respecté pour l'expédition de cette lettre.
Le décret n° 2017-1820 du 29 décembre 2017, pris en application de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, propose 6 modèles types de lettres de notification de licenciement, dont notamment un modèle de lettre de licenciement pour motif personnel non disciplinaire. Ces modèles sont facultatifs pour l‘employeur et peuvent être adaptés à la situation spécifique du salarié.
À noter : les dispositions conventionnelles applicables à l'entreprise doivent être vérifiées car elles peuvent prévoir le respect d'une procédure différente.
Important : si le salarié concerné est un salarié protégé, l'autorisation de l'inspecteur du travail doit être sollicitée.
Indemnisation du salarié licencié pour absences prolongées ou répétées pour maladie
Doivent être versées, par l'employeur, au salarié licencié :
- une indemnité compensatrice de préavis si une disposition conventionnelle ou contractuelle prévoit son versement dans tous cas. À défaut, elle n'a pas à être versée car le salarié en arrêt maladie ne peut pas effectuer son préavis ;
- une indemnité de licenciement, s'il en respecte les conditions d'attribution. L'indemnité la plus favorable doit être attribuée au salarié entre l'indemnité légale, conventionnelle, usuelle ou contractuelle de licenciement ;
- une indemnité compensatrice de congés payés si le salarié concerné par la mesure de licenciement n'a pas épuisé la totalité des congés payés qu'il a acquis avant son départ.