Licenciement pour cause de liquidation judiciaire

Sommaire

Refus de rétrogradation

Le licenciement d'un salarié pour motif économique est nécessairement mis en œuvre pour une cause réelle et sérieuse. L'employeur ne peut y avoir recours que dans des cas précis.

Cet article revient en détail sur l'encadrement juridique d'un licenciement pour cause de liquidation judiciaire.

Définition de la liquidation judiciaire

Toute liquidation judiciaire suppose que l'entreprise concernée soit en état de cessation des paiement (impossibilité de faire face au passif exigible avec l'actif disponible) et que son rétablissement soit manifestement impossible.

Le tribunal chargé de la liquidation judiciaire désigne un juge-commissaire, un liquidateur judiciaire et un représentant des salariés. Cette procédure met fin à l'activité de l'employeur par une liquidation de ses actifs et débouche alors sur une rupture inévitable des contrats de travail. Lorsque l'entreprise connaît une liquidation judiciaire, la procédure de licenciement qui l'accompagne est d'ordre économique.

Procédure de licenciement applicable

La procédure applicable aux licenciements d'une entreprise en situation de liquidation judiciaire est une procédure simplifiée.

Bon à savoir : un salarié licencié pour motif économique, en raison de la liquidation de la société, peut demander que son licenciement soit déclaré sans cause réelle et sérieuse si la cessation d’activité de l’entreprise résulte d’une faute ou d’une légèreté blâmable de l’employeur. En revanche, le licenciement reste valable si la faute reprochée par le salarié à l’employeur n’est pas à l’origine de la liquidation judiciaire (Cass. soc., 8 juillet 2020, n° 18-26.140).

Délais

Le liquidateur procède aux licenciements dans les 15 jours suivant le prononcé de la liquidation judiciaire jours (21 jours en cas de plan de sauvegarde de l'emploi) ou au plus tard à la fin de la poursuite d'activité.

En cas de liquidation judiciaire, les salariés sont assurés contre le risque de non paiement des salaires dus par l'AGS. Les créances résultant de la rupture des contrats de travail couvertes par l'AGS sont celles nées dans les 15 jours (21 jours en cas de PSE) suivant le jugement de liquidation. C'est pour cela que le liquidateur licencie dans ce délai.

Étapes de la procédure

En cas de liquidation judiciaire, les différentes étapes de la procédure de licenciement sont prévues à l'article L. 1233-58 du Code du travail) :

Rechercher des solutions de reclassement

Avant d'envisager un licenciement, il est impératif de rechercher des solutions de reclassement du salarié. Si c'est impossible, la procédure de licenciement peut être mise en place.

Bon à savoir : l'obligation de reclassement ne s'étend pas, sauf disposition conventionnelle le prévoyant, à d'autres entreprises qui ne relèvent pas d'un même groupe (Cass. soc., 8 janvier 2020, n° 18-14.373).

À noter : l’obligation de reclassement implique que l'employeur doit proposer aux salariés concernés tous les postes disponibles susceptibles de répondre aux conditions légales. Ainsi, un employeur peut proposer le même poste à plusieurs salariés (Cass. soc., 11 mai 2022, n° 21-15.250).

Mettre en œuvre un plan de licenciement

Dans les entreprises de 50 salariés et plus, un accord collectif peut déterminer le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) ainsi que les modalités de consultation du comité d'entreprise (CE) ou du comité social et économique (CSE) et de la mise en œuvre des licenciements.

Cet accord est signé par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins 50 % des suffrages au premier tour des dernières élections professionnelles.

L'Administration est informée sans délai de l'ouverture d'une négociation en vue de l'accord précité. À défaut d'accord, un document élaboré par l'employeur après la dernière réunion du CE/CSE  fixe le contenu du PSE.

Pour un licenciement d'au moins 10 salariés dans une entreprise d'au moins 50 salariés, le document (accord ou document unilatéral) est nécessairement validé ou homologué par la DREETS (direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités, ex-DIRECCTE).

L'autorité administrative notifie à l'employeur la décision de validation ou d'homologation dans un délai de 4 jours à compter de la date de réception. Lorsque l'autorité administrative rend une décision de refus de validation ou d'homologation, l'employeur consulte le CE/CSE  dans un délai de 3 jours.

Selon le cas, le document modifié et l'avis du comité d'entreprise, ou un avenant à l'accord collectif, sont transmis à l'autorité administrative, qui se prononce dans un délai de 3 jours.

Réunir et consulter les représentants du personnel

Le comité d'entreprise, ou les délégués du personnels (selon la taille de l'entreprise et le nombre de licenciements concernés) ou le comité social et économique s'il a été mis en place, sont réunis pour discuter du plan de licenciement.

Informer la DREETS (ex-Direccte)

La DREETS doit être informée du licenciement économique des salariés.

Convoquer les salariés à un entretien préalable

Sont concernées les entreprises qui projettent de licencier moins de 10 salariés dans une même période de 30 jours. Celles qui projettent de licencier au moins 10 salariés sur une même période de 30 jours, si elles ne disposent pas de représentants du personnel (article L. 1233-11 du Code du travail), sont également soumises à cet impératif.

Lorsque l'entreprise comporte un comité d'entreprise ou des délégués du personnel et que la procédure concerne au moins 10 licenciements, la procédure de l'entretien préalable n'a pas à être respectée (article L. 1233-38 du Code du travail).

Proposer au salarié d'adhérer au contrat de sécurisation professionnelle (CSP)

L'obligation de proposer au salarié d'adhérer au contrat de sécurisation professionnelle figure à l'article L. 1233-66 du Code du travail). Cette proposition est faite au cours de l'entretien préalable.

Bon à savoir : le dispositif du CSP a été prolongé jusqu’au  31 décembre 2023 (arrêté du 9 juin 2023 portant agrément de l'avenant n° 7 du 15 mars 2023 à la convention du 26 janvier 2015).

Notifier le licenciement

La lettre, envoyée en recommandé avec accusé de réception, doit préciser le motif justifiant le licenciement. La liquidation judiciaire justifie pleinement le licenciement économique. Toutefois, il doit être fait mention du jugement du tribunal ou de l'ordonnance du juge commissaire arrêtant la liquidation.

Le décret n° 2017-1820 du 29 décembre 2017, pris en application de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, propose 6 modèles types de lettres de notification de licenciement. Ces modèles sont facultatifs pour l‘employeur, et peuvent être adaptés à la situation spécifique du salarié. Le décret propose ainsi notamment des modèles de lettres de licenciement :

  • pour motif économique pour les petits licenciements collectifs de moins de 10 salariés dans une même période de 30 jours ou d'au moins 10 salariés dans une même période de 30 jours dans une entreprise de moins de 50 salariés ;
  • pour motif économique pour les grands licenciement collectifs avec plan de sauvegarde de l’emploi d’au moins 10 licenciements sur une même période de 30 jours dans une entreprise de plus de 50 salariés.

Remettre les documents de fin de contrat

Les documents de fin de contrat doivent être remis au salarié: solde de tout compte, certificat de travail, attestation Pôle emploi (attention, depuis le 1er juin 2021, les anciens modèles d'attestations ne sont plus acceptés par Pôle emploi : le modèle unique valide est disponible dans l'espace employeur sur pole-emploi.fr, ou sur le logiciel de paie pour les entreprises qui sont dans le périmètre de la DSN).

Attention : lorsque le salarié concerné par la mesure est un salarié protégé, il ne faut pas oublier de solliciter l'autorisation de l'inspecteur du travail.

Indemnités

En cas de licenciement pour motif économique et s'il en remplit les conditions d'attribution, le salarié perçoit la plus favorable de l'indemnité légale, conventionnelle, usuelle ou contractuelle de licenciement.

Rappel : l'indemnité légale de licenciement est versée à partir de 8 mois d'ancienneté ininterrompus au service du même employeur. Son montant ne peut être inférieur à 1/4 de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années jusqu'à 10 ans et à 1/3 de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années à partir de 10 ans (article L. 1234-9 et article R. 1234-2 du Code du travail, tels qu'issus de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 et du décret n° 2017-1398 du 25 septembre 2017).

Si le salarié n'a pas épuisé la totalité des congés payés qu'il a acquis avant son départ, une indemnité compensatrice de congés payés, égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence, lui est versée (article L. 3141-28 du Code du travail).

Une indemnité compensatrice de préavis est versée au salarié qui n'exécute pas le préavis (article L. 1234-5 du Code du travail). Si c'est le salarié qui est à l'origine de la dispense d'exécution du préavis, l'indemnité ne lui est pas versée. Elle n'est pas non plus versée au salarié qui a opté pour le CSP.

Liquidation judiciaire : absence de validation ou d'homologation du plan de licenciement

En cas de licenciements intervenus en l'absence de validation ou à l'homologation, ou en cas d'annulation d'une décision ayant procédé à la validation ou à l'homologation, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur. Celle-ci ne peut être inférieure aux salaires des 6 derniers mois (article L. 1233-58 du Code du travail).

En cas d'annulation d'une décision de validation ou d'homologation en raison d'une insuffisance de motivation, l'autorité administrative prend une nouvelle décision suffisamment motivée.

Cette décision doit intervenir dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement à l'administration. Elle est portée, par l'employeur, à la connaissance des salariés licenciés, à la suite de la première décision de validation ou d'homologation et par tout moyen permettant de conférer une date certaine à cette information.

Dès lors que l'autorité administrative a édicté cette nouvelle décision, l'annulation pour le seul motif d'insuffisance de motivation de la première décision de l'autorité administrative est sans incidence sur la validité du licenciement. Par ailleurs, elle ne donne pas lieu au versement d'une indemnité à la charge de l'employeur.

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