
Lorsqu'un employeur rompt le contrat de travail d'un salarié, il doit respecter une stricte procédure. Notifier le licenciement au salarié est l'une des étapes à respecter. Or, la notification du licenciement obéit à des conditions strictes, que vous devez connaître. Voici tout ce que vous devez savoir sur la lettre de licenciement.
En effet, lorsqu'un employeur décide de licencier un salarié, il est tenu de lui notifier sa décision (article L. 1232-6 du Code du travail) en respectant de strictes règles.
Notification par écrit du licenciement
La lettre de notification du licenciement doit répondre à une stricte condition de forme instituée par la loi, et ce, que le licenciement réponde à un motif personnel ou économique.
En effet, le licenciement doit impérativement être notifié par écrit, et plus précisément par lettre recommandée avec accusé de réception (article L. 1232-6 du Code du travail).
Bon à savoir : si le salarié ne reçoit pas la notification de licenciement en raison d'une erreur dans l'adresse inscrite sur le formulaire d'accusé de réception, le licenciement pourra être jugé sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 24 mai 2018, n° 17-16.362).
À noter : les juges considèrent que la remise de la lettre de licenciement en main propre contre décharge ou par voie d'huissier n'entache pas la procédure d'irrégularité. En effet, selon la Cour de cassation, la preuve de la notification du licenciement peut être apportée par tous moyens (Cass. soc., 29 septembre 2014, n° 12-26.932).
Le décret n° 2017-1820 du 29 décembre 2017, pris en application de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, propose 6 modèles types de lettres de notification de licenciement. Ces modèles sont facultatifs pour l‘employeur et peuvent être adaptés à la situation spécifique du salarié.
Le décret propose ainsi des modèles de lettres de licenciement :
- pour motif personnel disciplinaire pour faute sérieuse, grave ou lourde ;
- pour inaptitude d’origine non professionnelle et inaptitude d’origine professionnelle ;
- pour motif personnel non disciplinaire ;
- pour motif économique individuel ;
- pour motif économique pour les petits licenciements collectifs de moins de 10 salariés dans une même période de 30 jours, ou d'au moins 10 salariés dans une même période de 30 jours dans une entreprise de moins de 50 salariés ;
- pour motif économique pour les grands licenciements collectifs avec plan de sauvegarde de l’emploi d’au moins 10 licenciements sur une même période de 30 jours dans une entreprise de plus de 50 salariés.
Les juges considèrent que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en cas de :
- licenciement verbal (l'employeur a ordonné à son salarié de quitter définitivement son emploi, l'employeur communique sur le départ du salarié, etc.) ;
- défaut de signature sur la lettre de licenciement.
Dès lors que l'employeur notifie le licenciement par écrit, expédie la lettre de notification dans les délais, respecte les mentions obligatoires et, en cas d'envoi par lettre recommandée avec accusé de réception, adresse le courrier à l'adresse indiquée par le salarié, le licenciement ne peut pas être entaché d'irrégularité.
La Cour de cassation a précisé que le défaut d'acheminement par la Poste du courrier de notification n'était pas de nature à entacher la régularité du licenciement d'un salarié. En effet, dès lors que l’employeur a bien notifié le licenciement à l’adresse exacte du domicile du salarié dans le délai imposé, le retour du courrier à l'employeur avec la mention « défaut d’accès ou d’adressage », n'est pas de nature à rendre le licenciement irrégulier. Ce défaut d'acheminement par les services postaux étant étranger à toute mauvaise intention de la part de l'employeur (Cass. soc., 30 novembre 2017, n° 16-22.569).
À noter : l'employeur peut donner mandat à une personne appartenant au personnel de l'entreprise (directeur des ressources humaines, directeur financier...) pour signer la lettre de licenciement. Ce mandat ne suppose aucune condition de forme, il n'est donc pas nécessaire qu'une délégation de pouvoir écrite soit rédigée (Cass. soc., 29 septembre 2010, n° 09-42.296). Pour autant, le chef d'entreprise ne peut aucunement donner mandat à une personne extérieure à l'entreprise (expert comptable, avocat...). À défaut, le licenciement est considéré comme étant dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 26 avril 2017, n° 15-25.204).
Contenu de la lettre de licenciement
Le licenciement pour motif personnel
La lettre de licenciement mentionne le motif précis du licenciement. Le courrier doit obligatoirement énoncer les motifs du licenciement, de manière claire et précise. Il doit s'agir des seuls motifs discutés lors de l'entretien. Si l'employeur doit exprimer les motifs de manière précise, il n'est toutefois pas obligé de dater les éventuels faits fautifs.
À noter : un salarié en arrêt de travail suite à un accident du travail ou une maladie professionnelle ne peut pas être licencié sauf pour une faute grave ou en cas d'impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l'accident. Dans l'hypothèse où l'employeur licencie le salarié en arrêt de travail pour faute grave, il doit explicitement indiquer dans la lettre de licenciement la mention « licenciement pour faute grave ». À défaut, le licenciement est nul (Cass. soc., 20 novembre 2019, n° 18-16.715).
L'article R. 1232-13 du Code du travail (issu du décret n° 2017-1702 du 15 décembre 2017 pris en application de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail) permet au salarié de demander à l'employeur des précisions sur les motifs énoncés dans la lettre de licenciement. Cette demande doit être faite dans les quinze jours suivant la notification du licenciement, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. L'employeur dispose ensuite d'un délai de quinze jours après la réception de cette demande pour apporter des précisions s'il le souhaite.
En cas de contestation par le salarié, l'employeur ne pourra se fonder sur d'autres motifs que ceux énoncés dans la lettre ou dans les précisions ultérieures. Lorsque la lettre de licenciement n'est pas, ou peu, motivée, alors les juges considèrent que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et l'employeur encourt les sanctions prévues en cas de licenciement injustifié.
En principe, la lettre rappelle la procédure et informe le salarié de sa situation quant au préavis (à effectuer, dispense, durée...).
À noter : pour justifier la rupture du contrat de travail, un employeur est autorisé à mentionner, dans la lettre de licenciement, deux avertissements ayant sanctionné des faits de nature différente (Cass. soc., 3 avril 2019, n° 16-29.102).
Bon à savoir : dans le domaine du BTP, le licenciement d'un ouvrier malade, fondé sur des absences perturbant le fonctionnement d'un service essentiel au sein de l'entreprise, est autorisé. Néanmoins, l'ouvrier bénéficie d'une priorité de réembauche (le droit d'être informé de tous les postes disponibles pendant une durée limitée). L'employeur a l'obligation de mentionner cette priorité de réembauche dans la lettre de licenciement.
Le licenciement pour motif économique
Lorsque le licenciement est prononcé pour motif économique, la lettre de licenciement doit comporter les mentions suivantes :
- l'énoncé des motifs économiques (article L. 1233-16 du Code du travail) ;
- la possibilité de bénéficier d'un contrat de sécurisation professionnelle (CSP) lorsque l'entreprise comporte moins de 1 000 salariés ou qu'elle est en situation de redressement ou liquidation judiciaire ;
Bon à savoir : le dispositif du CSP a été prolongé jusqu’au 31 décembre 2023 (arrêté du 9 juin 2023 portant agrément de l'avenant n° 7 du 15 mars 2023 à la convention du 26 janvier 2015).
- la possibilité d'adhérer au congé de reclassement (CR) lorsque l'entreprise compte au moins 1 000 salariés ;
- l'existence d'une priorité de réembauche pendant un an à compter de la date de rupture du contrat ;
- le délai de contestation de la régularité et de la validité des licenciements.
À noter : l’employeur peut aménager son obligation en matière de priorité de réembauche. Par exemple, il peut assortir sa proposition de réembauche d’un délai de réponse que le salarié doit respecter, sous peine de ne pas être réembauché (Cass. soc., 17 avril 2019, n° 17-21.175).
Délai de notification de la lettre de licenciement
Licenciement pour motif personnel
La notification d'un licenciement prononcé pour motif personnel doit intervenir au moins 2 jours ouvrables après la date de l'entretien préalable (article L. 1232-6 du Code du travail).
Exemple : l'entretien préalable au licenciement du salarié a lieu un mardi. L'employeur ne peut adresser la lettre avant le vendredi suivant.
Si l'employeur ne respecte pas ce délai de 2 jours, il s'expose au paiement d'une indemnité au salarié en raison de l'irrégularité de la procédure.
Bon à savoir : si l’employeur décide de changer la date de l’entretien préalable, cela n’a aucune conséquence sur le point de départ du délai de 2 jours. Celui-ci reste fixé à la date initialement prévue et non pas à la date à laquelle l’entretien a réellement eu lieu suite au changement effectué par l’employeur.
Lorsque le licenciement est prononcé pour un motif disciplinaire (faute), alors la notification du licenciement doit nécessairement intervenir dans le délai d'un mois après la date de l'entretien préalable (article L. 1332-2 du Code du travail). Le non-respect de ce délai entraîne la requalification du licenciement en rupture dépourvue de cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 7 juillet 1998, n° 96-40.487).
Bon à savoir : des dispositions conventionnelles peuvent prévoir des délais différents.
Licenciement pour motif économique
Le délai de notification d'un licenciement économique dépend du nombre de salariés concernés par la procédure de la façon suivante :
- licenciement de moins de 10 salariés dans une même période de 30 jours (article L. 1233-15 du Code du travail) : la lettre de licenciement ne peut être expédiée moins de 7 jours ouvrables à compter de la date prévue de l'entretien préalable de licenciement auquel le salarié a été convoqué. Ce délai est porté à 15 jours lorsqu'il s'agit du licenciement individuel d'un membre du personnel d'encadrement ;
- licenciement d'au moins 10 salariés dans une même période de 30 jours : la lettre de notification ne peut être adressée avant l'expiration d'un délai courant à compter de la notification du projet de licenciement à l'autorité administrative, qui ne peut être inférieur à 30 jours (article L. 1233-39 du Code du travail).