Le déclassement professionnel consiste à placer un salarié dans une position inférieure à celle qu'il occupait. Un déclassement peut avoir lieu lorsqu'un salarié manque de compétences ou de qualifications.
Définition du déclassement professionnel
Manifestation du déclassement professionnel
Le déclassement peut se manifester de plusieurs manières, qui se cumulent ou non. Des responsabilités peuvent être retirées au salarié, avec une attribution de fonctions plutôt subalternes au lieu des fonctions élevées précédemment exercées. Les missions de commandement peuvent être supprimées du poste. Le salarié peut également être mis au placard.
En cas de déclassement, le titre ou le poste attribué au salarié peut changer de nom. Le salarié peut se voir attribuer un grade, un coefficient ou un échelon inférieur à celui qui était précédemment reconnu. Une baisse du salaire, ainsi qu'une diminution ou une suppression des primes, peuvent intervenir.
Reconnaître un cas de discrimination ou de harcèlement moral
Si ces mesures ne sont pas dues à une insuffisance professionnelle, mais sont motivées par exemple par le sexe du salarié, par ses origines ethniques ou par ses convictions religieuses, il s'agit d'une discrimination, prohibée par l'article L. 1132-1 du Code du travail.
Si le déclassement s'inscrit dans le cadre d'une série de mesures vexatoires répétées, il peut s'agir de harcèlement, pénalement répréhensible.
À noter : la loi n° 2018-703 du 3 août 2018 a élargi les faits constituant un harcèlement moral. Désormais, on considère qu'il y a harcèlement moral lorsque les « propos ou comportements sont imposés à une même victime par plusieurs personnes, de manière concertée ou à l'instigation de l'une d'elles, alors même que chacune de ces personnes n'a pas agi de façon répétée » ou lorsque les « propos ou comportements sont imposés à une même victime, successivement, par plusieurs personnes qui, même en l'absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition ». Par ailleurs, le fait de commettre des faits de harcèlement via un support numérique ou électronique devient une circonstance aggravante.
Déclassement professionnel non disciplinaire
Il se peut que l'employeur déclasse le salarié non pas pour des motifs disciplinaires, mais en invoquant des lacunes professionnelles, en matière de compétence, de productivité, de qualité du travail etc.
Conséquences sur le contrat de travail
Dans certains cas, le déclassement professionnel non disciplinaire peut s'analyser en une modification du contrat de travail. Tel est le cas, par exemple, si le salaire et les fonctions prévus par le contrat de travail sont modifiés à la baisse.
Or, l'entreprise n'a pas le droit de modifier unilatéralement les éléments essentiels du contrat de travail. Elle doit d'abord proposer cette modification au salarié. Ce dernier peut la refuser sans que ce refus constitue une faute.
Si l'entreprise modifie les éléments essentiels du contrat de travail sans l'accord du salarié, ce dernier est habilité à considérer que le contrat de travail est rompu à l'initiative de l'employeur. Il s'agit donc en fait d'un licenciement, donnant droit à indemnités pour le salarié.
Convention collective
Le salarié déclassé doit aussi regarder ce que dit l'accord collectif applicable dans l'entreprise, notamment la convention collective. Normalement, cette dernière doit contenir des dispositions relatives aux classifications et aux rémunérations, avec la définition des emplois. Le déclassement doit respecter ces dispositions.
Il est possible aussi que les accords collectifs applicables prévoient les conditions précises dans lesquelles les contrats de travail peuvent être modifiés.
Rétrogradation-sanction
Si le déclassement professionnel revêt un caractère disciplinaire, il s'agit d'une véritable sanction disciplinaire, la rétrogradation.
Ne pas confondre faute et insuffisance professionnelle
Une sanction disciplinaire n'est légitime que si le salarié a commis une faute disciplinaire. Or, l'insuffisance professionnelle ne constitue pas en soi une faute disciplinaire.
Toutefois, la distinction entre incompétence et faute disciplinaire n'est pas toujours aisée. L'entreprise qui souhaite déclasser un salarié, tout comme le salarié menacé de déclassement, doivent donc faire particulièrement attention au fondement et à la nature du déclassement envisagé.
Soit ce déclassement est fondé sur une faute disciplinaire, et constitue alors une rétrogradation-sanction, soit ce déclassement est fondé sur une simple insuffisance professionnelle et n'est alors pas disciplinaire.
Bon à savoir : la rétrogradation constitue une modification du contrat de travail qui nécessite l’accord du salarié. Dès lors que ce dernier refuse la rétrogradation, l’employeur ne peut pas la mettre à exécution. Par conséquent, l'employeur peut prononcer une autre sanction, y compris un licenciement pour faute (Cass. soc., 9 octobre 2019, n° 18-18.146). Un salarié qui accepte une rétrogradation disciplinaire dispose cependant du droit de contester la régularité et le bien-fondé de cette sanction (Cass. soc., 14 avril 2021, n° 19-12.180).
Pas de sanction pécuniaire
S'il s'agit bien d'une rétrogradation-sanction, l'entreprise doit respecter toutes les règles en matière de sanctions disciplinaires. En particulier, les sanctions pécuniaires sont interdites (article L 1331-2 du Code du travail). Un déclassement-sanction consistant à diminuer le salaire ou la prime d'un salarié sans que les fonctions et/ou les responsabilités de celui-ci soient modifiées est donc illégal.
En revanche, il n'y a pas sanction pécuniaire interdite si la diminution du salaire n'est que la conséquence d'une dépréciation des fonctions ou des responsabilités imposée au salarié à titre de sanction.
Respecter le règlement intérieur
Le salarié subissant une rétrogradation-sanction doit veiller à ce que le règlement intérieur de l'entreprise soit respecté. Ce dernier doit notamment préciser quelles sanctions l'employeur peut prendre.
Saisir les prud'hommes
Le salarié qui estime son déclassement professionnel infondé peut tenter de faire intervenir les délégués du personnel. Si le problème ne peut pas se régler autrement, il faut saisir le conseil des prud'hommes, juridiction spécialisée dans les relations de travail du secteur privé.
Le conseil des prud'hommes peut déclarer illégitime une rétrogradation-sanction. Il peut aussi décider qu'un salarié a été injustement déclassé pour des motifs non disciplinaires. Dans ce cas, il peut condamner l'entreprise à verser au salarié des rappels de salaires ou de primes, ainsi qu'à revenir sur le déclassement.
Si le déclassement du salarié est totalement injustifié et s'il lui fait perdre énormément en termes de salaire, de responsabilités ou de fonctions, ou encore s'il revêt un caractère vexatoire, ledit déclassement peut être considéré comme rendant impossible pour le salarié la continuation des relations de travail.
Cela peut donc s'analyser en une rupture du contrat de travail à l'initiative et aux torts de l'employeur. Il s'agit donc en fait d'un licenciement, avec obligation pour l'entreprise de verser au salarié des indemnités.