
Une mesure de licenciement peut parfois être la conséquence indirecte de la maladie, d'origine non professionnelle, du salarié. Dans quels cas le licenciement d'un salarié pour maladie non professionnelle peut-il être envisagé ? Faisons le tour de la question.
Le licenciement d'un salarié en raison de sa maladie est-il possible ?
Il est une chose primordiale à retenir : la maladie d'un salarié ne peut en aucun cas permettre de justifier son licenciement (article L. 1132-1 du Code du travail).
Licencier un salarié en raison de son état de santé est parfaitement prohibé et considéré comme discriminatoire. Si l'employeur méconnaît cette règle, alors le salarié peut demander aux juges de reconnaître la nullité de la rupture du contrat. En cas de licenciement, le salarié est réintégré, s'il le souhaite, dans son précédent poste. À défaut, il est indemnisé en conséquence.
Pour autant, la maladie d'un salarié peut, sous de strictes conditions, entraîner le licenciement du salarié. Tel est le cas lorsque :
- la maladie entraîne des absences prolongées et répétées ;
- le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail ;
- le salarié commet une faute ;
Exemple 1 : c'est le cas notamment lorsque le salarié continue à travailler alors que son état de santé met en danger la sécurité de ses collègues. Le fait que la poursuite de son travail soit un danger pour la santé et la sécurité de ses collègues justifie alors son licenciement (Cass. soc., 12 octobre 2017, n° 16-18836).
Exemple 2 : un sportif professionnel, qui se blesse dans l’exercice de son activité, mais qui refuse de se soumettre aux soins nécessaires malgré l'obligation de soin prévue par une clause contractuelle, manque de loyauté envers son employeur et commet une faute grave, justifiant son licenciement disciplinaire. En effet, bien qu'accidenté, le salarié commet un manquement à son obligation de loyauté (Cass. soc., 20 février 2019, n° 17-18.912).
- l'employeur est dans l'impossibilité de maintenir le contrat pour des raisons sans lien avec la maladie.
Absences répétées et prolongées pour cause de maladie : le possible licenciement
Lorsque la maladie d'un salarié entraîne des absences prolongées ou répétées, le licenciement peut être envisagé. Pour cela, 2 conditions cumulatives doivent nécessairement être remplies :
- les absences répétées ou prolongées perturbent le fonctionnement de l'entreprise en créant par exemple, une surcharge de travail pour les autres salariés, un mécontentement de la clientèle, etc. (Cass. soc., 12 janvier 2016, n° 14-17.642). Attention toutefois, ces absences doivent perturber un service essentiel au sein de l'entreprise. Si la preuve n'est pas apportée que le service considéré est indispensable au bon déroulement de l'activité de l'entreprise, le licenciement sera considéré comme nul pour motif discriminatoire lié à l'état de santé du salarié (Cass. soc., 23 mai 2017, n° 14-11.929) ;
- le remplacement définitif (CDI) du salarié s'impose (Cass. soc., 30 juin 1993, n° 90-44.165).
Important : pour justifier un licenciement, les absences prolongées ou répétées du salarié ne doivent aucunement être consécutives à un accident du travail, une maladie professionnelle ou un manquement de l'employeur à l'obligation qui est la sienne de préserver la santé et la sécurité de ses employés.
À noter : en cas de licenciement suite à la perturbation du fonctionnement de l'entreprise en raison de l'absence prolongée du salarié, si l'absence du salarié résulte du harcèlement moral de la part de l'employeur, la nullité du licenciement peut être prononcée (Cass. soc., 30 janvier 2019, n° 17-31.473).
Bon à savoir : dans le domaine du BTP, le licenciement d'un ouvrier malade, fondé sur des absences perturbant le fonctionnement d'un service essentiel au sein de l'entreprise, est autorisé. Néanmoins, l'ouvrier bénéficie d'une priorité de réembauche (le droit d'être informé de tous les postes disponibles pendant une durée limitée). L'employeur a l'obligation de mentionner cette priorité de réembauche dans la lettre de licenciement. L’employeur peut cependant aménager son obligation en matière de priorité de réembauche. Par exemple, il peut assortir sa proposition de réembauche d’un délai de réponse que le salarié doit respecter, sous peine de ne pas être réembauché (Cass. soc., 17 avril 2019, n° 17-21.175).
En présence d'une clause de garantie d'emploi, le licenciement du salarié peut être retardé car il ne peut être mis en œuvre qu'après l'expiration d'une période définie par ladite clause.
L'employeur, s'il remplit toutes les conditions susvisées, peut alors licencier son salarié en respectant la procédure applicable au licenciement pour motif personnel :
- convocation à un entretien préalable ;
- déroulement de l'entretien ;
- notification du licenciement ;
Bon à savoir : le décret n° 2017-1820 du 29 décembre 2017, pris en application de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, propose 6 modèles types de lettres de notification de licenciement. Ces modèles sont facultatifs pour l‘employeur, et peuvent être adaptés à la situation spécifique du salarié.
- respect d'un préavis ;
- remise des documents de fin de contrat: reçu pour solde de tout compte, certificat de travail, attestation Pôle emploi (attention, depuis le 1er juin 2021, les anciens modèles d'attestations ne sont plus acceptés par Pôle emploi : le modèle unique valide peut être trouvé dans l'espace employeur sur pole-emploi.fr, ou sur le logiciel de paie pour les entreprises qui sont dans le périmètre de la DSN).
Cette procédure peut être légèrement différente et plus complète si des dispositions conventionnelles s'imposant à l'employeur le prévoient.
À noter : lorsque le licenciement concerne un salarié protégé, l'employeur doit solliciter l'autorisation de l'inspecteur du travail.
Le salarié perçoit :
- une indemnité de licenciement ;
- une indemnité compensatrice de préavis lorsqu'une une disposition conventionnelle ou contractuelle prévoit son versement dans tous cas. À défaut, elle n'a pas à être versée car le salarié en arrêt maladie ne peut pas effectuer son préavis ;
- une indemnité compensatrice de congés payés s'il n'a pas épuisé la totalité des congés acquis avant son départ.
Maladie du salarié : inaptitude du salarié
La maladie d'un salarié peut conduire le médecin du travail a prononcé l'inaptitude du salarié à exercer ses fonctions.
Un salarié inapte peut faire l'objet d'une mesure de licenciement lorsque (article L. 1226-2-1 du Code du travail) :
- l'employeur justifie de son impossibilité de proposer un emploi approprié aux capacités du salarié ;
- le salarié refuse les propositions de reclassement de l'employeur ;
- le médecin du travail a mentionné dans l'avis que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.
L'inaptitude en elle-même ne suffit donc pas à justifier le licenciement du salarié. Lorsque l'une des 3 conditions précédentes est remplie, l'employeur peut alors licencier son salarié. Pour cela, il doit respecter la procédure de licenciement pour motif personnel.
Bon à savoir : dans le cas d’une inaptitude non professionnelle, l’employeur est tenu à une obligation de reclassement et doit consulter le CSE à ce sujet. L’absence de consultation du CSE prive le licenciement de cause réelle et sérieuse. Dans ce cas, c’est le barème d’indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse qui s’applique (Cass. soc., 30 septembre 2020, n° 19-11.974).
Le salarié perçoit, s'il en remplit les conditions d'attribution, une indemnité de licenciement et une indemnité compensatrice de congés payés. Étant en arrêt de travail et ne pouvant effectuer la période de préavis, il ne perçoit pas l'indemnité compensatrice de préavis, sauf si une disposition conventionnelle prévoit le contraire.
Bon à savoir : pour calculer l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement d'un salarié licencié pour inaptitude après un arrêt maladie, le salaire de base à retenir est, à l'avantage de l’intéressé, celui des 12 ou 3 derniers mois précédant l’arrêt de travail (Cass. soc., 23 mai 2017, n° 15-22.223, en application de l'article R. 1234-4 du Code du travail).
Attention ! Est nul le licenciement d’un salarié devenu handicapé et déclaré inapte à son poste dès lors que l’employeur n’a pas pris de mesures appropriées pour préserver son emploi, même si des recherches de reclassement ont été effectuées. En effet, ce licenciement est considéré comme discriminatoire (Cass. soc., 3 juin 2020, n° 18-21.993).
La faute grave et l'impossibilité de maintenir le contrat permettent le licenciement d'un salarié malade
Un salarié malade peut également faire l'objet d'un licenciement :
- disciplinaire pour faute : la faute peut avoir été commise avant l'arrêt de travail et avant l'apparition de la maladie ou pendant (non-respect de l'obligation de loyauté par exemple). Dans un tel cas, l'employeur doit respecter la procédure de licenciement disciplinaire et respecter les délais applicables pour sanctionner le salarié ;
- lorsque l'employeur se trouve dans l'impossibilité de maintenir le contrat de travail pour des raisons étrangères à l'état de santé du salarié, c'est-à-dire pour un motif économique (cessation d'activité de l'entreprise par exemple).