En cas de difficultés économiques d’une entreprise, il n’est pas toujours possible de rémunérer les salariés, ou d’avoir du travail à leur fournir pour l’intégralité de la durée prévue au contrat de travail. La procédure de chômage partiel constitue une alternative intéressante dans ces hypothèses. Quelle est la procédure mise en œuvre ?
Bon à savoir : depuis 2013, l'expression « chômage partiel » n'est plus utilisée dans le Code du travail, qui lui préfère désormais la notion d'« activité partielle » (article L. 5122-1 et suivants du Code du travail).
En raison de la crise sanitaire liée au Covid-19, le dispositif d'activité partielle a été modifié par le décret n° 2019-325 du 25 mars 2020, par l'ordonnance n° 2020-346 du 27 mars 2020 et par l'ordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020.
Le décret du 25 mars 2020 a mis en place un dispositif exceptionnel qui s'est appliqué avec effet rétroactif au 1er mars 2020 : il améliorait le montant financier de l'allocation, simplifiait la procédure de recours à l'activité partielle, et réduisait les délais de traitement des demandes. Ce dispositif a évolué depuis le 1er septembre 2021, et concerne de moins en moins d’entreprises. Cependant, les salariés se trouvant dans l’impossibilité de travailler (garde d’enfant et personnes vulnérables définies par le décret n° 2021-1162 du 8 septembre 2021) continuent à bénéficier de ce dispositif avantageux.
Présentation du chômage partiel
Qu’est-ce que le chômage partiel ?
Le chômage partiel est utilisé lorsque l’employeur envisage de cesser de manière temporaire l’activité de l’entreprise, ou envisage de réduire la durée du travail en raison de difficultés économiques dans l’entreprise.
Les salariés sont placés en position d'activité partielle, après autorisation expresse ou implicite de l'autorité administrative, s'ils subissent une perte de rémunération imputable (article L. 5122-1 du Code du travail) :
- soit à la fermeture temporaire de leur établissement ou d'une partie d'établissement ;
- soit à la réduction de l'horaire de travail pratiqué dans l'établissement ou partie d'établissement en deçà de la durée légale de travail, soit 35 heures.
En cas de réduction collective de l'horaire de travail, les salariés peuvent être placés en position d'activité partielle individuellement et alternativement.
Bon à savoir : les salariés placés en activité partielle peuvent bénéficier d’une formation (article L. 5122-2 du Code du travail), et notamment de la reconversion ou promotion par alternance (Pro-A) – article L. 6324-1 du Code du travail, tel qu'issu de l'ordonnance n° 2019-861 du 21 août 2019.
Conditions de mise en œuvre
L’activité partielle peut être mise en œuvre lorsque l'entreprise est contrainte de réduire ou de suspendre temporairement son activité pour l'un des motifs suivants (article R. 5122-1 du Code du travail) :
- la conjoncture économique ;
- des difficultés d'approvisionnement en matières premières ou en énergie ;
- un sinistre ou des intempéries de caractère exceptionnel ;
- la transformation, restructuration ou modernisation de l'entreprise ;
- toute autre circonstance de caractère exceptionnel.
Chômage partiel : la procédure
Procédure interne à l’entreprise
L'employeur doit adresser au préfet du département où est implanté l'établissement concerné une demande d'autorisation d'activité partielle (article R. 5122-2 du Code du travail). Cette demande est accompagnée de l'avis préalable du comité social et économique.
La consultation doit concerner :
- les motifs de recours ;
- les catégories professionnelles et les activités concernées ;
- le niveau et les modalités de mise en œuvre des réductions d'horaire ;
- les actions de formation envisagées ou tout autre engagement pris par l'employeur.
En l’absence de représentants du personnel dans l’entreprise, il faut informer l’ensemble des salariés.
Lorsque l’employeur dépose une demande préalable d’autorisation pour des sinistres ou intempéries de caractère exceptionnel, ou toute autre circonstance de caractère exceptionnel, il peut recueillir l'avis du CSE postérieurement à la demande et dispose d’un délai de 2 mois à compter du dépôt de la demande pour communiquer cet avis à la DREETS.
Pour les demandes d’autorisation d’activité partielle adressées à l'Administration à compter du 1er juillet 2021, l’autorisation pouvait être accordée pour une durée maximum de 3 mois. Elle pouvait être renouvelée dans la limite de 6 mois, consécutifs ou non, sur une période de référence de 12 mois consécutifs. Les périodes d'autorisation d'activité partielle antérieures au 1er juillet 2021 n'étaient pas prises en compte pour calculer la durée globale de 6 mois. Par ailleurs, pour les demandes déposées entre le 1er janvier et le 31 mars 2022, les périodes d'activité partielle intervenues en 2021 n'étaient pas prises en compte.
Bon à savoir : le chômage partiel ne concernait pas les employés à domicile qui peuvent continuer à se rendre chez leur employeur. Les employés concernés sont ceux qui exercent une activité de garde d’enfant à domicile, d’assistance à personnes âgées ou handicapées, d’entretien de la maison, de travaux ménagers de bricolage ou de jardinage, la livraison de repas, linge et courses, l’assistance informatique et les cours à domicile. Lorsqu'un employeur n’acceptait pas son employé à domicile pendant le confinement, il devait lui payer les heures qu’il aurait dû effectuer (décret n° 2020-1331 du 2 novembre 2020 modifiant le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020).
Par ailleurs, la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 a rétabli le dispositif d’activité partielle pour les salariés vulnérables présentant un risque avéré de développer une forme grave d’infection à la Covid-19 jusqu'au 31 janvier 2023. L’employeur pouvait placer en activité partielle des salariés vulnérables à la Covid répondant aux critères suivants :
- être dans une situation médicale de vulnérabilité ;
- exercer son emploi à un poste susceptible de les exposer à de fortes densités virales ;
- ne pas pouvoir recourir totalement au télétravail.
Bon à savoir : l’indemnité d’activité partielle versée aux personnes vulnérables est de 70 % de leur rémunération brute par heure chômée dans la limite de 4,5 fois le Smic horaire.
À noter : en revanche, l’activité partielle pour « garde d’enfants » n’a pas été reconduite et a pris fin le 31 juillet 2022.
Procédure externe à l’entreprise
Une demande doit être préparée. Elle doit comporter :
- des informations relatives à l'identité de l'employeur ;
- la liste nominative des salariés concernés ainsi que le numéro d'inscription au répertoire national d'identification des personnes physiques ;
- les états nominatifs précisant notamment le nombre d'heures chômées par salarié ;
- les motifs justifiant le recours à l'activité partielle ;
- la période prévisible de sous-activité.
Pour les établissements appliquant un accord d'aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine et inférieure à l'année, l'employeur y joint, dans le cas où il ne souhaite pas un remboursement à la fin de la période, une demande de remboursement mensuel.
La demande est adressée par voie dématérialisée à la DREETS qui se charge d'en assurer la conservation selon des modalités garantissant l'intégrité des informations reçues. La demande est adressée par voie dématérialisée. Le suivi de la demande peut également être réalisé en ligne.
En cas de suspension d'activité due à un sinistre ou à des intempéries, l'employeur dispose d'un délai de trente jours pour adresser sa demande par tout moyen conférant date certaine (article R. 5122-3 du Code du travail). Depuis le 1er mars 2020, les entreprises ont également 30 jours après la mise en place de l’activité partielle, pour déposer leur demande sous le motif de « circonstances exceptionnelles ». L’acceptation de la demande permet une indemnisation rétroactive de l’entreprise, dans la limite de trente jours (décret n° 2019-325 du 25 mars 2020).
La décision d'autorisation ou de refus, signée par le préfet, est notifiée à l'employeur dans un délai de quinze jours à compter de la date de réception de la demande d'autorisation (article R. 5122-4 du Code du travail). La décision d'autorisation précise les coordonnées bancaires de l'employeur. L'absence de décision dans un délai de quinze jours vaut acceptation implicite de la demande.
La décision de refus est motivée. La décision du préfet est notifiée par voie dématérialisée à l'employeur, lequel en informe le comité d'entreprise ou, en l'absence de comité d'entreprise, les délégués du personnel.
Chômage partiel : indemnisation
Indemnisation du salarié
Le salarié perçoit une indemnité d'activité partielle versée par l'entreprise. Le montant de cette indemnité est fixé à 60 % de sa rémunération brute horaire par heure chômée (soit 72 % du salaire net). Il peut toutefois correspondre à la totalité de la rémunération brute en cas de suivi d'une action de formation.
L'ordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020 prévoit la prise en compte des heures supplémentaires contractuelles et conventionnelles (convention individuelle de forfait en heures, conventions ou accords collectifs prévoyant une durée de travail supérieure à la durée légale du travail).
Le contingent annuel d'heures indemnisables au titre de l'allocation d'activité partielle est fixé à 1 000 heures par salarié (arrêté du 26 août 2013).
Bon à savoir : les salariés à temps plein qui perçoivent une rémunération mensuelle inférieure au SMIC bénéficient d'une allocation complémentaire. L’ordonnance du 27 mars 2020 permet également aux salariés à temps partiel de bénéficier de la rémunération mensuelle minimale (RMM) : le taux horaire de l’indemnité d’activité partielle versée aux salariés à temps partiel ne peut pas être inférieur au taux horaire du SMIC.
À noter : les salariés qui ont perçu une indemnité horaire d'activité partielle depuis le 1er mars 2020 acquièrent des droits à la retraite. Cette disposition, prévue par la loi n° 2020-734 du 17 juin 2020, a été pérennisée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021. Un contingent de 220 heures est requis pour la validation d'un trimestre de retraite dans la limite de 4 trimestres (décret n° 2021-570 du 10 mai 2021).
Remboursement de l'employeur
Si le préfet valide la situation, l’État versera une allocation spécifique à l'entreprise. Depuis mars 2020, l'allocation n’est plus forfaitaire mais proportionnelle à la rémunération des salariés placés en activité partielle.
Le montant de cette allocation est fixé à 36 % de de la rémunération horaire brute de référence avec un minimum de 8,21 € et un maximum de 18,66 €.
Ainsi, dans la limite de 4,5 SMIC, l’employeur n’a pas de reste à charge ; au-delà, l’employeur supporte la charge financière du différentiel. Par ailleurs, cette allocation est soumise à un quota de 1 000 heures. Selon les cas, une entreprise pourra demander une dérogation pour dépasser ce quota.
Pour se faire rembourser les indemnités versées aux salariés en activité partielle, l'employeur doit adresser en ligne une demande d'indemnisation au titre de l'allocation d'activité partielle tous les mois. Le paiement est effectué par l'Agence de services et de paiement (ASP) qui agit pour le compte de l'État.
Avant le 24 septembre 2018, l'employeur disposait d'un délai de 4 ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle un salarié avait été placé en activité partielle (prescription quadriennale des créances sur l'État) pour effectuer cette demande d'indemnisation. Depuis le 24 septembre 2018, le délai durant lequel l'employeur peut solliciter le paiement de son allocation a été ramené à un an après le terme de la période couverte par l'autorisation. Au-delà, la demande est prescrite (loi n° 2018-1317 de finances pour 2019).
Indemnités en cas de chômage partiel ou technique Lire l'article
Dispositif exceptionnel : activité partielle de longue durée
Principe de l’APLD
L’activité partielle de longue durée (APLD) est un dispositif temporaire de soutien à l’activité économique. Il a pu s'appliquer jusqu'au 30 décembre 2022. Il permettait aux entreprises confrontées à une réduction d’activité durable de diminuer l’horaire de travail de leurs salariés en contrepartie d’engagements notamment en matière de maintien de l’emploi (l’entreprise ne devait pas licencier au cours du dispositif).
Les dispositifs mis en place avant le 1er janvier 2023 peuvent continuer à s'appliquer jusqu'au 31 décembre 2026 au plus tard.
Bon à savoir : les conditions de mises en œuvre de l’APLD ont été définies par le décret n° 2020-926 du 28 juillet 2020.
L’activité partielle de longue durée pouvait être mise en place pour une durée de 36 mois au plus, consécutifs ou non, sur une période de 48 mois consécutifs (prolongement par le décret n° 2022-508 du 8 avril 2022).
Bon à savoir : le décompte était réalisé en mois civils. Un mois durant lequel l’entreprise recourait à l’APLD compte pour un mois entier. Il n’était pas nécessaire de le préciser dans l’accord ou le planning prévisionnel de recours au dispositif. Seule devait être indiquée la durée totale envisagée.
La réduction du temps de travail du salarié ne pouvait être supérieure à 40 % de l’horaire légal par salarié, sur la durée totale de la mise en place du dispositif.
À noter : l’APLD pouvait être mise en place par toutes les entreprises situées en France quelle que soit leur taille ou leur secteur d’activité.
Bon à savoir : le décret n° 2021-1162 du 8 septembre 2021 fixe les conditions dans lesquelles les salariés les plus vulnérables peuvent être placés en activité partielle. Ces conditions s’appliquaient à compter du 27 septembre 2021.
Mise en place de l’APLD
Le dispositif était mis en place :
- soit par la conclusion d’un accord collectif d’établissement, d’entreprise ou de groupe ;
- soit, en application d’un accord de branche étendu, par la création un document conforme aux stipulations de l’accord de branche et définissant les engagements en matière d’emploi et de formation professionnelle. L’employeur pouvait établir un document unilatéral sans être tenu d’engager des négociations sur l’APLD.
Dans tous les cas, l’accord était transmis à la DREETS qui disposait ensuite de 15 jours pour le valider. En cas d’accord de la DREETS, le dispositif était accordé par période de 6 mois.
À noter : depuis le 1er octobre 2020, le silence de l’Administration valait accord au bout de 15 jours à compter de la réception de la demande (décret n° 2020-1188 du 29 septembre 2020).
Bon à savoir : l’APLD est un dispositif temporaire : il s’applique aux accords collectifs transmis à l’Administration pour extension, validation ou homologation, au plus tard le 31 décembre 2022 (ordonnance n° 2022-543 du 13 avril 2022).
Prise en charge dans le cadre de l’activité partielle de longue durée
Le salarié placé en activité partielle longue durée percevait une indemnité horaire versée par l’employeur et correspondant à 70 % de sa rémunération brute servant d’assiette de l’indemnité de congés payés dans la limite de 4,5 SMIC.
L’indemnité versée au salarié est un revenu de remplacement qui, à ce titre, est exclu de l’assiette de cotisations et contributions de sécurité sociale. En revanche, elle est soumise à la CSG et à la CRDS sur les revenus de remplacement.
Par ailleurs, l’employeur avait la possibilité de verser une indemnité complémentaire, qui vient s’ajouter à l’indemnité légale d’APLD. Si le montant de l’indemnité totale (APLD + indemnité complémentaire versée par l’employeur) est supérieur à 3,15 SMIC, la part de l’indemnité complémentaire qui excède cette limite est soumise à cotisations et contributions de sécurité sociale.
De son côté, l’employeur recevait de l’État et de l’Unédic 60 % de la rémunération horaire brute limitée à 4,5 fois le taux horaire du SMIC, quelle que soit la date de transmission de l’accord relatif à l’APLD à l’Administration (décret n° 2020-1188 du 29 septembre 2020).
À noter : le taux horaire plancher de l’allocation est fixé à 9,12 €.
Bon à savoir : les salariés placés sous le régime de l’activité partielle de longue durée bénéficient d’une attribution de points au régime de retraite complémentaire dans les mêmes conditions que pour l’activité partielle de droit commun. Ils bénéficient ainsi de points de retraite complémentaire au-delà de la 60e heure indemnisée (circ. Agirc-Arrco 2020-21-DRJ du 23 décembre 2020).
En cas de licenciement d’un salarié au sein d’une entreprise placée sous le régime de l’activité partielle, l’employeur était tenu de rembourser les sommes versées par l’État au titre de l’activité partielle (décret n° 2020-1188 du 29 septembre 2020). Le remboursement dû par l'employeur n'était pas exigible si les perspectives d'activité s'étaient dégradées par rapport à celles prévues dans l'accord collectif ou le document de l'employeur.
À noter : les cadres dirigeants pouvaient être placés sous le régime de l’APLD uniquement pour les périodes de suspension temporaire totale de l’activité. En revanche, pour les périodes donnant lieu à une simple réduction horaire du temps de travail, l’APLD était impossible et ne donne donc pas lieu à indemnisation.